Comédie dramatique de Jerry Sterner, mise en scène de Robin Renucci, avec Nadine Darmon, Marilyne Fontaine, Xavier Gallais, Robin Renucci et Jean-Marie Winling.
On est désormais coutumier des spectacles traitant de sujets économiques ou même expliquant l'économie ou des phénomènes lui étant liés.Des adaptations de Frédéric Lordon par Judith Bernard ("Le Grand Retournement", "Bienvenue dans l'Angle Alpha") aux créations de Carole Thibaut ("Monkey Money"), s'est développé un théâtre didactique ayant vocation à décrypter ou à décortiquer tout ce qui touche à la science économique. "L'Avaleur", adapté par Evelyne Loew de la pièce de Jerry Sterner, "Other People's Money" et mis en scène par Robin Renucci, s'attaque aux boursiers qui sont prêts à détruire des entreprises qui fonctionnent à des seuls fins spéculatives. Volontiers explicatif et pédagogique, le travail de Robin Renucci va consister à suivre, presque en temps réel, les étapes qui conduiront une entreprise bien identifiable, la CFC, ("Câble Français de Cherbourg") à disparaître au profit... du profit. Un prédateur financier de la City, appelé opportunément "Kafaim", Franck Kafaim (Xavier Gallais), va sortir ses griffes pour s'en emparer, quoi qu'il advienne aux salariés et à la pérennité de l'entreprise. La démonstration opérée est à la fois plaisante et savante et l'on ne s'ennuie jamais dans ce bras-de-fer conté par Robin Renucci comme un combat à suspense entre d'une part, le brave PDG (Jean-Marie Winling), s'appuyant sur son directeur (Robin Renucci) et la fille avocate internationale (Marilyne Fontaine) de sa fidèle secrétaire-maîtresse (Nadine Darmon), et d'autre part, l'as des as des coups retors, Franck Kafaim. Après avoir monté "Le Faiseur" de Balzac, c'est la deuxième incursion de Robin Renucci dans la description du monde de la finance. Il s'agit pour lui de toucher le plus grand nombre et donc de ne pas craindre le schématisme, voire le manichéisme, pour atteindre tout le public et lui faire comprendre comment marche une entreprise et sur quoi elle s'appuie pour dégager des fonds. Dans "L'Avaleur", il y a ainsi, d'un côté, le gentil capital entrepreneurial, humain et familial, et de l'autre, le méchant capital financier, sans foi ni loi, incarné par Kafaim et son faux-ventre à la John Falstaff. Dans le rôle, Xavier Gallais se régale. Il est à son meilleur et mange sans peine ses adversaires. On ne saura jamais si cela tient à la volonté de l'auteur et du metteur en scène, ou à la force de conviction de l'acteur, mais les arguments cyniques qu'il martèle triomphent aisément du prêchi-prêcha bien pensant de la partie cherbourgeoise. "L'Avaleur" sera un parfait spectacle pour les collégiens et les lycéens pour qu'ils s'initient aux questions qui rythmeront leurs vies d'adultes. On en restera avant tout au constat, sans ouvrir aucune perspective d'avenir pour lutter contre des personnages aussi malfaisants que Franck Kafaim. Mais Robin Renucci a réussi son pari puisqu'il s'est donné pour objectif d'ouvrir à tous des questions et des mécanismes réservés en général à des spécialistes. On ne peut que l'en féliciter et attendre le prochain chapitre théâtral qui approfondira encore les questions traitées dans "L'Avaleur". |