Comédie dramatique de Georg Büchner, mise en scène de François Orsoni, avec Brice Borg, Jean Louis Coulloc'h, Mathieu Genet, Alban Guyon et Jenna Thiam.
George Büchner a 21 ans quand il écrit "La Mort de Danton" et il n'a plus que deux ans à vivre. On est en 1835 et il faudra attendre le 20ème siècle pour que la pièce soit jouée. C'est dire si ce texte dense, fort, parfois didactique et sur lequel l'auteur ne s'est pas beaucoup expliqué, n'a rien d'évident. On peut incontestablement parler de pièce difficile, sentiment que la belle traduction, plus littéraire que littérale, d'Arthur Adamov ne dissipe pas. La scénographie "bifrontale" qui distribue les spectateurs de part et d'autre d'une longue table occupée par les acteurs qui pour, quatre d'entre eux, incarnent à la fois des personnages du peuple et des grandes figures révolutionnaires pendant que dans le même moment Mathieu Genet est uniquement Danton a le désavantage de rendre la pièce très statique. Avec ses 26 personnages, la pièce de Büchner a longtemps été considérée comme injouable. Avec seulement cinq, dans la mise en scène de François Orsoni, règne une certaine confusion. Ainsi Jenna Thiam, excellente par ailleurs, incarne à la fois la femme de Danton et Lucille Desmoulins. Elle ne peut dès lors vraiment jouer sur plusieurs registres. Lucille Desmoulins, personnage romantique s'il en est, qui va mourir volontairement aux côtés de celui qu'elle aime par-dessus tout, n'est pas submergé par l'émotion. Les scènes avec son époux ne génère aucune exaltation révolutionnaire ou lyrique. Parfois très théorique et déclamatoire, "La Mort de Danton" dresse un portrait saisissant de la Révolution et de ses serviteurs. Tous veulent un monde nouveau et sont prêts au sacrifice suprême pour y parvenir.
François Orsini a le mérite de ne pas céder totalement à la doxa actuelle faisant de la Terreur l'ancêtre de toutes les horreurs modernes. Entre Danton, le jouisseur corrompu et Robespierre l'incorruptible rigoriste, il respecte l'équilibre esquissé par Georg Büchner. On pourra lui reprocher sa vision de Saint-Just, joué par Brice Borg, qu'on traitait jadis d'ange ou de Rimbaud de la Révolution, et qui, ici, est barbu et porte un tablier d'islamique.
Mais, au contraire, on lui saura gré de ces moments chantés, porteurs d'utopie et de jours meilleurs, à l'image d'une Marseillaise douce joliment interprétée par Jean-Louis Coulloc'h. |