Comédie dramatique écrite par Stéphane Gornikowski, mise en scène de Guillaume Bailliart, avec Lyly Chartiez-Mignauw, Grégory Cinus et Malkhior.
Depuis quelques années, s'est réveillé un théâtre à teneur politique qu'on qualifiera pour faire vite d'ultra gauche.
On se souvient des spectacles montés par Judith Bernard soit d'après Frédéric Lordon ("D'un retournement à l'autre", "Bienvenue dans l'angle Alpha") soit sur ses propres textes ("Amargi"). On pourrait aussi y associer la trilogie politique de Nicolas Lambert qui s'est achevé avec le magistral "Le maniement des larmes".
C'est dans cette lignée que Stéphane Gornikowski a décidé d'adapter à la scène "La violence des riches", l'un des essais du couple de sociologues Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot.
Spécialistes de la grande bourgeoisie, à qui ils ont consacré de nombreux ouvrages, dont le plus célèbre est "Les Ghettos du Gotha", ils dénoncent depuis longtemps la violence que les riches exercent sciemment sur les pauvres.
Si on n'a jamais lu leurs ouvrages, qu'on n'a pas eu connaissance de leurs travaux par les nombreux articles qui leur sont consacrés dans "Le Monde Diplomatique, et que ne les a pas plus entendu dans des entretiens radiophoniques avec Daniel Mermet dans "Là-bas si j'y suis" sur France Inter, on trouvera sans doute un intérêt certain à la version théâtrale de Stéphane Gornikowski mis en scène par Guillaume Bailliart. Bien entendu, la forme choisie ferait paraître aujourd'hui les brechtiens d'hier comme des avant-gardistes forcenés. Les petits sketchs qui se succèdent à usage didactique ne sont pas très novateurs et restent très superficiels quant à leur contenu. Ce qui est évoqué à coups de pancartes ou de slogans par les trois acteurs (Lily Chartiez-Mignauw, Grégory Cinus et Malkhior) fait mouche. On les remerciera de distribuer au public un intéressant questionnaire qui permet de savoir - à coup sûr - si l'on appartient ou pas à la classe des privilégiés ; on aura pour eux de la gratitude d'avoir eu la bonne idée d'interroger Monique Pinçon-Charlot au téléphone et de faire comme si elle était en direct à l'autre bout du combiné. Mais il ne faudra pas à s'attendre trouver dans ce spectacle la motivation nécessaire pour sortir le drapeau rouge ou noir et tenter d'aller le faire flotter sur l'Élysée. Plaisant ou astucieux, capable de réveiller quelques évidences qu'on ose à peine répéter tant le néo-capitalisme libéral sait présenter sa marchandise dans un bel écrin, cette "violence des riches" à la scène s'avère finalement trop gentille avec ces gros méchants qu'on aimerait - au moins - voir écrabouiller symboliquement. Mais peut-être s'agit-il d'une entreprise de longue haleine et que le spectacle proposé est un jalon nécessaire, en tout cas salutaire, avant qu'arrivent des œuvres plus accomplies sur scène et plus incisives dans leurs critiques. |