Monologue dramatique d'après des textes de Matéi Visniec conçu et interprété par Bruno Abadie. En 1992, le dramaturge roumain Matéi Visniec publiait une série de textes courts, autonomes et polysémiques, véritables exercices de style, de la fable à la dystopie, de la satire à la parodie sur le mode du Sots Art, constituant autant de constellations surréalistes sur l'écran noir du questionnement existentiel. Erigés en modules théâtraux et qualifiés de "textes pour un spectacle-dialogue de monologues", ils sont réunis dans un recueil-concept intitulé "Théâtre décomposé" . En effet, dans un avertissement liminaire, Matéi Visniec précisait que ces dramuscules constituent les pièces d'un puzzle, les morceaux brisés d'un miroir imaginaire, propices à un jeu sans fin consistant en un agencement combinatoire laissé à la discrétion du metteur en scène. Bruno Abadie a puisé dans ce thésaurus pour s'élaborer un monologue dramatique sur mesure - "Le silence du miroir" - et a modifié les règles du jeu en procédant au tronçonnage et à l'imbrication des partitions sélectionnées pour raconter les vicissitudes d'un seul personnage. Ce parti-pris entraîne la rupture de la logique et de la dramaturgie interne de chaque texte sans y substituer une cohérence convaincante. A l'écoute de cette adaptation, pour laquelle Bruno Abadie officie dans la pénombre dans un registre de jeu qui emprunte au cinéma expressionniste, le spectateur se perd dans un labyrinthe dans les dédales duquel se télescopent des réminiscences tant littéraires que théâtrales, de Guy de Maupassant à Lewis Caroll en passant par Georges Orwell, de Brecht à Ionesco en passant par Mrozek.
Et son histoire de laveur de cerveaux, dont le jardin de choux fait les délices de lapins passe-muraille, puis qui devient homme-poubelle, entend des voix derrière le miroir et se réfugie dans son cercle, incite à la lecture des opus originaux. |