Réalisé par Marco Danieli. Italie/France. Drame. 1h41 (Sortie le 19 avril 2017). Avec Sara Serraiocco, Michele Riondino, Marco Leonardi, Stefania Montorsi, Pippo Delbono, Lucia Mascino, Martina Cerroni et Giorgio Careccia.
Reconnus comme religion aux États-Unis et considérés comme secte par la plupart des pays européens, Les Témoins de Jéhovah n'avaient jusqu'à présent quasiment jamais inspirés des cinéastes.
C'est donc fait avec "L'Affranchie" de Marco Danieli, documentariste qui signe ici son premier long-métrage de fiction.
Giula est une jeune fille apparemment "normale" : elle vit dans une famille unie, réussit mieux que bien au lycée et cache sa beauté sous des vêtements amples et sans goût. Car Giula appartient aux Témoins de Jéhovah, et en bon adepte, elle va prêcher la bonne parole de porte en porte.
Très convaincue et très influencée par sa famille et tous ses proches qui appartiennent aussi aux Témoins de Jéhovah, elle paraît pourtant mal à l'aise, mal dans sa peau. Sans doute est-elle prête à douter. Mais, malgré sa prof de maths qui lui prédit de brillantes études, elle doit accepter un boulot sans intérêt dans une entreprise appartenant aux Témoins de Jéhovah.
"L'Affranchie" de Marco Danieli décrit comment un groupe, a fortiori à caractère religieux, pèse sur ses membres, les imprègne et les empêche de sortir du cadre dans lequel il les enferme.
Giula devra passer par l'amour de Libero, un autre "affranchi", mais cette fois au sens que Martin Scorsese lui donne dans ses films de gangster, pour s'en sortir. Et encore, on devrait mettre de gros guillemets au verbe "s'en sortir" tant est vraiment douloureux le sort du membre qui a voulu s'extraire de ce genre de communauté fermée.
L'histoire forte qu'elle vit avec Libero va être une véritable passion humaine et pas une obsession divine. Elle aura les vertus d'une cure qui la conduira jusqu'à la transgression, puisqu'elle reprendra ses habits de Témoin de Jéhovah à des fins peu orthodoxes.
Le personnage presque christique de Libero est peut-être un peu trop tragique pour être réaliste et son sacrifice pour que Giula parte vers une nouvelle vie un peu trop cliché.
Pour certains, "L'Affranchie" de Marco Danieli rappellera ces films de bonne facture propices à un "Dossier de l'écran" d'antan, c'est-à-dire parfait pour illustrer un "sujet de société". Il vaut cependant plus que ça, notamment grâce aux deux jeunes interprètes de Libero (Michele Riondino) et de Giula (Sarra Serraiocco). Celle-ci, présente quasi constamment à l'écran, porte le film et contribue largement à sa réussite.
On signalera aussi, comme une évidence, la présence inquiétante de Pippo Delbono dans le rôle d'un des dirigeants des Témoins de Jéhovah qui vient signifier à Giula son "excommunication".
Sans être une charge outrancière contre une forme de sectarisme, "L'Affranchie" de Marco Danieli décrit surtout très bien le moment où le sentiment rassurant d'appartenance vacille et qu'il laisse place au désarroi de l'homme libre, condamné à penser par lui-même et à aimer selon ses goûts. |