Hiver 2017. Quelque part au bord d’une route du Maroc. Un amandier en fleur qui pousse au milieu d’un désert rocailleux. Raoul stoppe le Van. Sophia descend et prend plusieurs photos. Elle le sait, l’image sera parfaite pour la pochette du disque en devenir. Un arbre qui fleurit en hiver au milieu du silence, parfaite métaphore de leur album qui finit de se construire dans le désert.
Outside, le premier album du duo An Eagle in your mind, est sorti début mai en totale autoproduction, enregistré de la même manière dont vivent ses deux créateurs : sur la route, dans un van. Un choix de vie lié pour beaucoup à leur projet musical : tourner en Europe entre le printemps et l’automne, voyager l’hiver pour enregistrer, loin de tout, en mouvement perpétuel et avec une entière liberté. Deux micros branchés dans un ordi portable, deux petites enceintes pour écouter, le tout branché sur un panneau solaire, comme dirait notre ami torréfacteur : what else ?
Isolés dans le sud du Maroc, entre les portes du désert et le bord de l’océan, Sophia et Raoul ont confectionné un album de toute beauté, riche et envoûtant. On y entend les nuits fraîches et sans lune, les longues marches au bord de l’eau et les matins arides à guetter le lever du soleil pour appuyer sur Record, panneau solaire oblige. Musicalement, le résultat est logiquement très métissé, des riffs de guitare très blues qui posent l’ambiance, des rythmiques fait maison qui flirtent avec des beats d’abstract hip-hop, des orgues et des harmoniums qui amènent liant et profondeur… et la voix de Sophia, parfois puissante profonde et grave, parfois douce et perchée sur un nuage. Une présence douce-amère qu’on savoure tout au long du disque.
L’ambiance pourrait rappeler certains titres de Susheela Raman ou certaines rythmiques brulantes de Lhasa, mais à chaque fois, des éléments empruntés au bluegrass, au folk, voire même au rock (des larsens de guitares bien sentis, des effets de slapback sur la voix…) brouillent les pistes et créent un univers bien à eux. On s’étonne d’ailleurs de voir certaines alliances musicales fonctionner aussi bien quand celles-ci vont puiser autant dans l’Ouest Américain que dans le Moyen-Orient, autant dans de la musique sacrée sans âge que dans des productions très modernes.
On a déjà hâte de connaître la prochaine destination de ces deux oiseaux migrateurs, et de savoir quels trésors ils nous ramèneront la prochaine fois.
Tout fout le camp en ce moment. En attendant des jours meilleurs, accrochons nous et noyons notre chagrin dans la culture !Cc'est parti pour le sommaire de la semaine en commençant par le replay de la 63eme Mare Aux Grenouilles.