Vendredi 25 août
Les Dirty Deep n'ont que faire de la pluie symbolique qui mouille à peine les ponchos des premiers festivaliers du vendredi. Ayant déjà conquis mon cœur dans une petite salle de mon coin bourguignon, les trois artistes ne font que confirmer par ce set d'excellente qualité, que leur blues rock garage saturé, motivé, décomplexé, engagé et j'en passe, a tout d'un grand. On leur souhaite une longue et belle carrière.
Si bien que les Goat Girl font pâle figure à côté, avec leur rock blasé de midinettes encore très hésitantes sur scène. A la pré-écoute, oui, c'est merveilleux – même si, l'internaute ne peut accéder qu'à quatre ou cinq titres pour se faire une idée : "Country Sleaze", encensé par les Inrocks, "Crow cries", et "Scum" entre autres. Toujours est-il que si les petites anglaises sont soutenues par un grand et influent label – Rough Trade Records –, le scénique est encore clairement à travailler avant de mériter complètement la comparaison avec Shame ou les Fat White Family...
Nouvel ascenseur émotionnel : la folie de Turbonegro emporte tout sur son passage, dans un grand élan de joie et, surtout, de n'importe quoi. De leurs costumes, tous plus décalés les uns que les autres, à l'emballement que déclenche chacun de leurs titres, du charisme tatoué de Thomas Seltzer à la forme olympique de Knut Schreiner, on hallucine complètement de ne découvrir ce groupe de heavy que maintenant. Un concert complètement génial (entre autres grâce aux prémices de "Bohemian Rhapsody") et totalement improbable.
Parquet Courts, c'est le groupe que je rate depuis quelques années en festival ou ailleurs. Du coup, il était impossible pour moi de ne pas aller admirer les ingénieux Américains jouer, sans peur ni reproches, leur judicieux et authentique néo punk rock. Si les petits gars ne paient pas de mine sur scène – je vois quelques novices se moquer des mimiques habitées d'Andrew Savage dans le public –, la justesse et la puissance de chaque titre l'emporte sur tout.
Valeur sûre, bulldozer du garage rock, duo à la belle complicité scénique, Alison Mosshart et Jamie Hince en ont encore mis un coup sur la grande scène du Cabaret vert. Si on n'est pas toujours emballée par la reverb à outrance et le minimaliste de certains moments, on goûte bien plus des titres comme le merveilleux "Echo home" (Ash & Ice, 2016) qui illustre parfaitement la capacité de The Kills à ne pas toujours jouer avec la facilité de la saturation...
Si on l'avait croisé en salopette en 2016 aux Eurockéennes, on le retrouve tout de rouge vêtu (ses acolytes itou) à Charleville-Mézières. Entre temps, Ty Segall a clairement fait évoluer son scénique : moins brouillon, moins "garage", moins spontané, moins... Moins, jusqu'à ce que la force du solo l'emporte sur la nécessité du paraître. C'est essentiellement son dernier album Ty Segall que les Californiens sont venus défendre, et... Ça se défend bien.
Face à ce déchaînement rock et ses multiples déclinaisons, on peut dire que ce samedi est assez exceptionnel en terme de programmation et de prestations... Et pourtant, c'est Jain qui remporte l'adhésion inconditionnelle du public... Comme je l'avais noté ici il y a peu, l'évolution de Jain est tout à fait fulgurante : en quelques années, on est passé d'une timidité mignonne à un son et lumière bien rodé (à tel point qu'on peut, d'un festival à l'autre, anticiper, mots pour mots, ses interventions et ses échanges avec le public...). Jain gagne en maturité ce qu'elle perd en authenticité. La dure loi de la musique commerciale ?
Du coup, on file écouter la pop lisse, lisse, lisse de Band of Horses : ça se laisse écouter, le temps d'une pause, et on ne peut pas reprocher à Ben Bridwell de ne pas chanter juste ou de ne pas aguicher avec sa pedal steel. Mais ça manque d'entrain comme de rugosité, et ça sent un peu trop la guimauve pour nous. Soupirs.
De toute façon, c'est Korn qui nous intéresse, que nous attendons, que nous vénérons. Et Jonathan Davis sortira le grand jeu pour nous plaire, et ce pas seulement parce que le kilt et la cornemuse sont de sortie. Niveau setlist, on est servis : on commence par "Rotting in vain", on passe par "Here to stay", "Twist", "Make me bad", on termine par "Blind" ou encore par "Freak on a Leash". Rien n'a bougé depuis mes quinze ans, et on attend déjà la prochaine date du groupe sans ciller... Comme Cypress Hill la veille, Korn atomise la scène Zanzibar et reste fidèle à sa réputation.
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