Réalisé par Stephan Komandarev. Bulgarie/Allemagne/Macédoine. Drame. 1h43 (Sortie le 11 octobre 2017). Avec Vassil Vassilev, Ivan Barnev, Assen Blatechki, Irini Zhambonas, Vasil Banov, Troyan Gogov, Dobrin Dosev et Guerassim Gueorguiev.
Le "film de taxi" pourrait presque être un genre cinématographique. Depuis "Taxi Driver" de Martin Scorsese jusqu'à Luc Besson et sa franchise marseillaise, en passant par "Taxi Téhéran" de Jafar Panahi, on sait que le taxi est un lieu propice à l'étude du genre humain et le chauffeur de taxi, enfermé dans son véhicule, un observateur des turpitudes des sociétés humaines.
Cette fois-ci, avec "Taxi Sofia" de Stephan Komandarev, on ne va pas suivre les tribulations d'un seul taxi ou de plusieurs clients du même taxi. Non, "Taxi Sofia" se rapprocherait plutôt du film de Jim Jarmusch, "Une nuit sur la terre", où chaque "sketch" se déroulait dans un taxi d'un pays différent.
Ici, l'action se passe aussi dans plusieurs taxis, mais dans un seul pays, dans la seule capitale de ce pays.
Si l'on ignorait tout de Sofia, grâce à Komandarev, il n'en sera plus de même : pas une parcelle de la ville qui n'aura pas été filmée par sa caméra fureteuse.
Ancien psychiatre devenu réalisateur, Komandarev n'aime pas filmer pour ne rien dire. Les histoires s'enchaînent, se croisent ou s'entrecroisent, dessinant à la fois un paysage physique de Sofia, mais également un état mental de la capitale bulgare, forcément reflet de la société post-communiste.
On ne peut pas dire que le constat soit globalement positif. Les anciens communistes se dissimulent en affairistes fanatiques de la mondialisation, les lycéennes font des passes, les petits patrons étranglés par la mafia sont obligés de redevenir taxis.
Chaque saynète dans le taxi a quelque chose de très puissant que le réalisateur pousse jusqu'à la théâtralité grâce à des plans-séquences magistraux. Cela tombe bien, les acteurs bulgares sont, comme leurs homologues russes, formés au théâtre tchekhovien dont on sent l'influence dans chaque épisode.
"Taxi Sofia" de Stephan Komandarev peut se voir comme un thriller efficace, superbement filmé, notamment dans toute sa partie nocturne.
Mais l'ambition du cinéaste est ailleurs et l'on pressent en lui quelqu'un qui s'avère un observateur vigilant de l'évolution de son pays qui reste à ce jour le plus pauvre de l'Union Européenne.
A découvrir absolument. |