Comédie romantique musicale de Claire-Marie Systchenko et Eric Bongrand, mise en scène de Vincent Vittoz, avec Claire-Marie Systchenko (ou Cloé Horry), Fred Colas, Noémie François, Hélène Hardouin et Emmanuel Quatra.
Est-ce bien raisonnable de vouloir faire une comédie musicale qui se passe uniquement dans une chambre d'hôpital et qui raconte au jour le jour la survie d'une femme en coma en profond ? Et qui plus est de vouloir que cette comédie musicale soit drôle ? C'est le pari tenu et gagné magistralement par Claire-Marie Systchenko et Eric Bongrand, les auteurs de "Chambre 113". En une centaine de minutes, cinq comédiens-chanteurs vont faire d'un plateau composé de structures mobiles et d'un lit d'hôpital un espace digne des grandes scènes de Broadway. Mathilde (Cloé Horry ou Claire-Marie Systchenko) a été victime d'un accident de la circulation. Son mari, Julien (Fred Colas), se retrouve dans le service du docteur Grinsky (Emmanuel Quatra) où elle a été transférée et est désormais maintenue en vie artificielle sous la surveillance de deux infirmières, la chevronnée Roseline (Hélène Hardouin) et la blonde Natacha (Noémie François) évidemment convoitée par le Docteur Grinsky... Il faut préciser que si Mathilde est allongée sur son lit blanc, son "fantôme virtuel" est bien vivant sur scène et participe au spectacle même si ses partenaires sont censés ne pas la voir. Rondement mené, riche en beaux moments musicaux, "Chambre 113" est avant tout un suspense, un double suspense : Mathilde se réveillera-t-elle ? Et comment Julien vivra-t-il cette présence-absence qui l'oblige à s'interroger sur son couple qui, visiblement, battait de l'aile ? Jamais de temps morts donc, jamais de remplissage non plus. Même quand Roseline, l'alerte infirmière, s'amuse à imiter Carmen Miranda dans un numéro brésilien qui fera date, on ne ressentira pas cela comme étant à côté de la plaque. Pareillement, l'innénarable docteur Grinsky, dans ses tentatives infructueuses à éveiller le désir de Natacha ou dans ses solos auto-satisfaits, est là pour faire le pendant des "duos" poignants entre Mathilde et Julien. En s'appuyant sur un décor mobile, en perpétuel mouvement, Vincent Vittoz donne vraiment du rythme à ce spectacle et démontre que la situation est aléatoire, susceptible à tout moment de changer. Alternant le drame et la farce, les séquences hilarantes et les moments d'émotion, les auteurs de "Chambre 113" ont composé une vraie comédie musicale. On oublie très vite qu'ils ne sont "que" cinq et l'on prend plaisir à les entendre très bien chanter et jouer superbement.
Sans doute, Eric Bongrand et Claire-Marie Systchenko connaissent par cœur les œuvres du couple Michel Legrand-Jacques Demy, puisque leur travail est plus proche des "Parapluies de Cherbourg" que de "Notre Dame-de-Paris".
Encore une fois, on soulignera qu'en quelques années, la comédie musicale à la française a pris son envol. "Chambre 113" en est une preuve éclatante qui devrait connaître de beaux jours tant son sujet est original et son traitement impeccable.
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