Comédie dystopique écrite et mise en scène par Joël Maillard, avec Joëlle Fontannaz et Joël Maillard.
Ah, la Suisse, le pays, entre autres, du Ricola, de Zouc et de Fischli et Weiss ! Et plus fort que le chocolat et le coucou, l'humour suisse...
Joël Maillard, auteur, acteur, metteur en scène et fondateur de la Compagnie Snaut dédiée au thème de la disparition de l’individu et de l’humanité, qui croit au pouvoir libérateur du rire ("Je fais des spectacles avec blagues"), n'en manque pas.
Pour son millésime 2017 intitulé "Quitter la terre", il indique dans sa note d'intention "utiliser certains codes de la science-fiction" pour "évoquer la situation présente par le biais de l’excès, de la déformation et de l’humour" en s'affranchissant du réalisme et de la plausibilité "pour proposer une sorte d’expérience de pensée".
Et, là encore, force est de constater qu'il atteint son but avec, dans le genre peu usité de la dystopie, un opus original aussi attractif qu'immersif qui se déroule dans un univers de "l'entre-deux" en raison d'une épatante scénographie pro-domo réalisée avec la collaboration notamment de Christian Bovey pour la modélisation informatique et de Louis Jucker, concepteur et compositeur de la musique "pour calmer les esprits" (sic).
Tout commence dans le registre du docu-fiction présenté, dans le cadre d'un congrès de "futurologie dilettante", par deux intervenants fantaisistes portant le même prénom de plus éponyme à ceux des comédiens (Joëlle Fontannaz et Joël Maillard) qui exposent un scénario catastrophe peu exploré, celui de l'extinction de l'espèce humaine pour cause de stérilité généralisée.
Afin de parer à cette tragédie, et sans que jamais ne soit évoqué un quelconque Big Brother, de petites colonies humaines, maintenues dans un état d'hébétude, de dénuement et d'ignorance absolus, sont expédiées avec comme leur mémoire comme seul viatique, dans de singulières stations spatiales dont la primeur doit être laissée au spectateur.
Et les conférenciers, tous deux épatants, également embarqués, à l'insu de leur plein gré, dans leur propre discours, quittent aussi le réel du ici, là et maintenant du plateau pour s'investir dans le rôle de stationautes.
Référencée dans l'univers de la science-fiction des années 1970 la partition de cette aventure galactique repose sur des pseudo-spéculations intellectuelles soumises d'autant plus à la sagacité de l'auditoire qu'elles abordent de nombreux thèmes majeurs intemporels, de la culture au vivre ensemble en passant par la transmission du savoir.
Soutenue par un humour pince-sans-rire à visée, dixit l'auteur, apotropaïque pour déjouer l'angoisse anticipative d'une apocalypse qui n'a rien de joyeux, elle s'avère totalement roborative. |