Réalisé par Jean-Baptiste Germain. France. Drame. 1h06 (Sortie le 20 décembre 2017). Avec Bruno Dauphin, Clémentine Billy, Madanie Boussaïd, Philippe Chompret, David Brel Michel Mira, James Climent et Séerine Cousot.
Ici, on défend souvent des œuvres "minoritaires" qu'on sent tourner à l'arrache, avec les moyens du cœur et du bord.
"Lac Noir" de Jean-Baptiste Germain appartient à cette catégorie de films qui peuvent passer inaperçus, mais que ceux qui les verront par hasard ou télécommandés par une curiosité viscérale, n'oublieront pas. Et cela au delà de tout jugement de valeur.
Car il ne faut pas juger "Lac Noir" comme un énième film d'une semaine où il y en aura une vingtaine à voir alors que l'essentiel des salles pratiquera la politique des "quatre Jedi".
D'abord, "Lac Noir", court long métrage de 66 minutes, est tourné dans de somptueux paysages perdus de la France des routes buissonnières et bénéficie d'un noir et blanc à craquer.
Il se présente comme un documentaire-fiction où des proches de Michel, le héros incarné par Bruno Germain, le racontent alors qu'on le suit dans un ultime voyage - forcément initiatique - jusqu'au lac noir.
Film profondément chrétien dans lequel Michel est au contraire un "païen" converti à des valeurs extrêmes, "Lac Noir" cherche la source de la vie et de la mort. Figure christique, Michel ramasse en route d'autres jeunes gens à la recherche de l'étincelle qui donnera enfin un sens à leur existence.
Parmi eux, domine la belle figure solaire de Clémentine Billy. Toute jeune fille au physique charnue qu'on qualifierait d'appétissant, si on ne craignait pas d'être accusé de harcèlement textuel, Clémentine a l'innocence qui fait autant de mal que de bien à celui qu'une tumeur méchante transforme en mort-vivant.
Avec son physique évoquant une juvénile Penelope Cruz, Clémentine irradie ce "Lac Noir". Face à Bruno Dauphin, fragile et faussement tout en muscles, porteur de certitudes qui ne vont pas tenir la route, elle est un espèce d'ange en short très singulier.
"Lac Noir" de Jean-Baptiste Germain revendique cette singularité de film atypique, un peu à l'image de ceux de Cheyenne Carron. On soulignera le courage du réalisateur d'avoir qualifié politiquement son héros, d'en avoir fait un "fasciste" dans la lignée d'un Maurice Ronet lui aussi à la dérive dans "Le Feu Follet".
Cette seule évocation d'un personnage positif issu de l'extrême-droite le coupera sans doute de bien des critiques épousant le tabou politique dominant. C'est une fois de plus une grave erreur : Michel est un être de conviction, un rebelle sportif sans doute revenu de tous les humanismes pervertis. Il expie la "faute" d'être dans le mauvais camp en acceptant cette maladie sournoise.
Homme d'honneur à l'ancienne, marchant vers une impossible guérison et une aussi improbable rédemption, il forcera l'admiration. Bruno Dauphin est vraiment formidable et l'on estimera davantage Jean-Baptiste Germain d'avoir su lui donner un rôle qu'il transcende en le nourrissant certainement à l'aune de son histoire personnelle.
En complément de programme, on pourra aussi voir "Le Régicide", un court-métrage de 38 minutes tourné par Jean-Baptiste Germain après "Lac Noir". Ce film consacré aux rapports du réalisateur avec son père confirmera son goût pour l'auto-fiction. On y verra aussi deux autres réalisateurs proches de Jean-Baptiste Germain, Emilie Brisavoine (auteur de "Pauline s'arrache") et Régis Sauder (auteur de "Retour à Forbach" et de "Nous, Princesses de Clèves"). |