Réalisé par Samuel Jouy. France. Drame. 1h34 (Sortie le 31 janvier 2018). Avec Mathieu Kassovitz, Olivia Merilahti, Souleymane M'Baye, Billie Blain, Salem Lyes, Tomy Leconte, Ali Labidi et David Saracino.
La boxe est le sport qui a sans doute suscité le plus de films. Métaphore de la vie (grandeur et chute), la carrière d'un boxeur est propice à des mélos flamboyants et des tranches de vie à vif.
Qu'on se souvienne de "Fat City" de John Huston ou de "Rocco et ses frères" de Luchino Visconti, la boxe au cinéma n'est pas que violence pure ou simulacre de "noble art" version Rocky et Compagnie.
"Sparring" de Samuel Jouy ne cherche pas l'originalité, mais vise la vérité, c'est-à-dire la vraisemblance. Hymne aux pires losers, dont le générique de fin (à ne pas manquer) égrène des exemples hallucinants – du genre 300 combats et... 4 victoires –, il permet de comprendre pourquoi on peut aimer prendre autant de coups pour aussi peu de vraies satisfactions.
En "vieux" boxeur à la limite du combat de trop, Mathieu Kassovitz, qui s'est réellement mis à la boxe anglaise pour l'occasion, livre son meilleur combat cinématographique.
Tenace dans l'humiliation, il accepte tout pour sa famille, pour sa dignité de perdant, pour qu'il y ait au bout du compte un sens à toutes ses années terribles. Jamais le réalisateur ni l'acteur ne poussent le personnage vers la martyrologie.
Ce n'est pas une passion christique ou la recherche d'une rédemption. "Sparring" est un film de boxe laïc. Si Steve Landry se bat, c'est pour rester fidèle à l'enfant qu'il fut, et qu'il revoit dans les yeux de son fils.
Une dernière fois, il va monter sur le ring en enfant qui croyait être un jour un champion, qui se rêvait champion. Maintenant, s'il rêve c'est que son fils retienne la leçon de ses combats, pour en mener à son tour d'autres, mais surtout sans avoir besoin d'enfiler des gants en cuir rouge.
Aux côtés de Kassovitz, le primo-réalisateur a réuni un casting crédible. A-è commencer par Olivia Merilahti, par ailleurs chanteuse talentueuse, qui joue sa femme.
Plus jeune que lui, on la devine dans le doute, piégée dans un couple sans grand avenir, avec deux enfants et un homme qu'elle aime qui va bientôt tomber dans les petits boulots et qu'elle devra soutenir à bout de bras. L'aimera-t-elle assez pour ne pas l'abandonner s'il ne sait pas gérer sa "retraite" des rings...
Samuel Jouy a eu aussi la belle idée de faire d'Yves Afonso l'ultime entraîneur de Steve Landry. Celui qui fut le "Grand Poucet" dans "Week-End" de Godard et "P'tit Gars Marcel" dans "Maine Océan" de Rozier, le partenaire de Stévenin dans son "Double Messieurs", et qui est mort fin janvier 2018 aura donc terminé sa carrière dans ce premier film inspiré.
On espère qu'il a pu se voir et vérifier, encore une fois, qu'il est parfait dans ses deux ou trois minutes où il accompagne Mathieu Kassovitz sur l'écran.
"Sparring" de Samuel Jouy est vraiment une bonne surprise. Au début de cette chronique, on signalait que le film de boxe était un genre cinématographique en soi.
Force est de constater que le cinéma américain s'y taille la part du lion et le cinéma français la part congrue avec quelques biopics, type "Edith et Marcel" de Claude Lelouch ou plus récemment "Victor Young Perez" de Jacques Ouaniche.
Dès lors, il ne sera pas abusif d'écrire que "Sparring" de Samuel Jouy est une réussite, une des seules réussites françaises dans ce domaine particulier du sport-spectacle mis en images. |