Comédie épique d'après l'oeuvre éponyme d'Henrik Ibsen, mise en scène d'Irina Brook, avec Helene Arntzen, Froydis Arntzen Dale, Diego Asensio, Jerry Di Giacomo, Scott Koehler, Mireille Maalouf, Roméo Monteiro, Damien Petit, Margherita Pupulin, Pascal Reva, Augustin Ruhabura, Gen Shimaoka, Shantala Shivalingappa et Ingvar Sigurdsson.
Attention ! Que ceux qui comptaient voir "Peer Gynt" dans une adaptation fidèle à l'un des chef d'oeuvres du norvégien Henrik Ibsen, ou ceux qui espéraient le découvrir ainsi, se dispensent de l'adaptation en anglais d'Irina Brook, car ils risquent la pure et simple apoplexie.
Si la metteuse en scène, in fine, respecte la trame de la tragi-comédie décrivant la vie tumultueuse d'un homme à la recherche de lui-même, rien ne garantit qu'ils s'esbaudissent devant cette version bruyante, bariolée et déjantée de "Peer Gynt"
A l'origine, la pièce d'Ibsen était accompagnée d'une musique de son compatriote Edvard Grieg. Irina Brook a préféré lui adjoindre des airs de rock, de country, et même deux chansons du proto-punk Iggy Pop et elle a fait de la plupart des personnages des musiciens, confiant les rôles à des acteurs athlètes complets, capables de jouer ou chanter.
Cette innovation radicale, avec en point d'orgue la starification de Peer Gynt, devenu "PG" une super-star du rock'n'roll circus, lui permet de créer une odyssée musicale dans laquelle les épisodes s'enchaînent à un rythme rapide.
Elle réussit tout particulièrement les saynètes à la limite du parodique, à l'instar de celle où Peer Gynt à la dérive se retrouve dans une ambiance "western" avec cow-girl sexy en body panthère.
Elle est aussi servie par un comédien d'exception, l'Islandais Ingvar Sigurdsson, bien connu des amateurs de la série "Trapped", qui compose un Peer Gynt tonique, aussi crédible en rock star qu'en loque humaine et dont l'interprétation devrait faire date.
A ses côtés, c'est toute la distribution comportant une douzaine d'acteurs-musiciens jouant chacun plusieurs rôles qui mériterait d'être cité. On retiendra en particulier les femmes que délaissent Peer Gynt dans sa vie dissolue, à commencer sa mère, Aase, jouée par Mireille Maalouf, une actrice de la troupe de Peter Brook et par Solveig, Pénélope de ce moderne Ulysse, subtilement incarnée par la danseuse Shantala Shivalingappa, elle aussi habituée des productions de Peter Brook.
Une fois accepté que son "Peer Gynt" soit un patchwork plein de bruits, de couleurs et de fureurs, où l'on entendra de la musique électrifiée et des poèmes de Sam Shepard, où tout ne sera pas égal alors que la neige tombera constamment sur le plateau, on ne pourra qu'admirer la créativité d'Irina Brook et la qualité de ses interprètes, constamment en train de se changer et de changer de rôle, sans que cela vire au capharnaüm et à la cacophonie.
Elle donne ici à voir un vrai spectacle où les trolls rock'n'roll ne feront pas peur mais fourniront un des tableaux les plus réussis, un tableau digne de Fellini.
On le répète, si on ne lui tient pas rigueur de s'inspirer de Peer Gynt pour revisiter le burlesque et les sketches des Monty Python, on écarquillera énormément les yeux devant cette proposition euphorique et distrayante. |