Comédie dramatique de Thierry Jahn et Jérôme Ragon d'après un roman de John Fowles, mise en scène de Céline Ronté et Thierry Jahn, avec Elodie Menant, Marie Tirmont et Thierry Jahn.
Frédéric (Thierry Jahn) collectionne les papillons et Mélanie (Marie Tirmont en alternance avec Elodie Menant) les ennuis dans cette pièce adaptée de John Fowles, dans ce huis clos stressant où une jeune femme est à la merci d'un jeune homme.
En 1965, William Wyler, le réalisateur de Ben Hur, avait tiré de ce récit matière à un film angoissant avec des cadrages et des lumières très savants pour accentuer l'effet de peur. Le film s'appelait "L'obsédé et réunissait Terence Stamp, plus énigmatique que jamais, et Samantha Eggar une brune à croquer dans les rêts d'un pervers très polymorphe.
Dans leur adaptation théâtrale, Thierry Jahn et Jérôme Ragon ne jouent pas sur les mêmes codes et savent rester très longtemps dans un échange somme toute "civil" et "courtois" entre le ravisseur et sa victime.
Ne bénéficiant pas de la musique suggestive de Maurice Jarre, la mise en scène de Céline Ronté et Thierry Jahn travaille sur un registre très minutieux. Les petits faits s'accumulent, comme les petits choses, dans un décor au départ plutôt vide à l'égal de la pensée de la jeune femme poussée dans cette cave sombre. Tout, que ce soient les lieux ou l'esprit de Mélanie, se remplit comme pour signifier qu'il va falloir bientôt en arriver à la fatale résolution...
Thierry Jahn joue les jeunes gens sans intérêt, sans charisme, sans rien de notable en eux avec beaucoup de vérité. Il sait éliminer tout charme et se construit un personnage terne mais calculateur qui effraiera bien plus que s'il démontrait une quelconque intelligence complexe.
Marie Tirmont est très convaincante en victime qui use de tous les possibles pour se sortir de son cauchemar. Tour à tour, soumise ou révoltée, cherchant soit à endormir son bourreau soit à provoquer en lui une réaction qui lui serait salutaire, elle n'est pas un agneau qui consentirait à se rendre à l'abattoir sans combat.
Dans l'astucieuse utilisation du hors-scène, notamment le pseudo escalier qui mène à l'étage de la maison isolée dans laquelle Mélanie est retenue, Thierry Jahn et Céline Ronté a conçu un spectacle très rythmé et qui n'a rien à envier au film en termes d'efficacité même s'il n'a pas ses moyens pour y parvenir.
On insistera aussi sur la création lumière de Philippe Marcq, dont les jeux sur l'ombre et la pénombre compte pour beaucoup dans la constitution d'un climat anxiogène, d'une ambiance quasi-gothique.
En bref, l'idée qui paraissait saugrenue de faire renaître par les voies théâtrales "Le Collectionneur" très ancré dans les années 1960 et considéré comme un des textes fondateurs du genre "thriller", s'avère plutôt excellente. Même la situation, désormais rebattue d'un otage face à son bourreau aux intentions pas claires, ne souffre aucune contestation.
L'amateur de "pièces policières" comme le spectateur sensible à la forme et la dramaturgie prendront plaisir à cette belle adaptation à qui l'on prédit un vrai succès. |