Musique sep Théâtre sep Expos sep Cinéma sep Lecture sep Bien Vivre
  Galerie Photos sep Nos Podcasts sep Twitch
 
recherche
recherche
Activer la recherche avancée
Accueil
 
puce puce
puce L'Inconnu
Tod Browning  1907

Réalisé par Tod Browning. Etats Unis. Drame. 1h05 (Sortie en 1927). Avec Lon Chaney, Joan Crawford, Norman Kerry, John George, Frank Lanning et Polly Moran.

"-J’ai vu un film là-dessus. Il y avait une femme qui avait peur que les hommes la prennent dans leurs bras. Elle supportait pas. Alors il y a un type, pour lui plaire, il s’est fait couper les bras.
- Les deux ?
- Oui, enfin, j’sais pas, je crois. Un ou deux. En tout cas, je sais, il a fait ça par amour."

Gérard Depardieu raconte un film dans éLa Femme d’à côtéé. Ce film, c’est "L’Inconnu", de Tod Browning.

Une histoire folle, un sacrifice amoureux qui convient bien à la tragédie noire de François Truffaut. Alonso (Lon Chaney) est un criminel. Recherché par la police, il se dissimule dans un cirque, et se fait passer pour un homme-tronc. Il tombe éperdument amoureux de la fille du patron (Joan Crawford) ; comme le dit tout simplement Gérard Depardieu, elle refuse le contact avec les hommes.

Et quand son secret menace d’être révélé, Alonso préfère se faire couper les deux bras plutôt que de la perdre.

C’est donc bien une histoire d’amour, une histoire comme on ose à peine en raconter, et comme on n’envisagerait même pas de tourner aujourd’hui. Il faut le génie et la folie de Tod Browning pour faire accepter pareil conte. C’est vrai que nous sommes, quelques années avant son film le plus célèbre, "Freaks", déjà dans le monde du cirque. Un monde qui a ses règles propres, ses coutumes et où la bizarrerie n’est jamais ce que l’on croit.

Dans un univers clos qui rassemble tous les exclus, les corps hors-normes se retrouvent. Lon Chaney utilise ses pieds pour tenir une cigarette ou porter un verre de vin à la bouche, quand ce n’est pas pour lancer un couteau sur une cible mouvante. Son corps entier pallie un manque inventé. L’acteur américain était connu pour son goût du déguisement, son talent à se travestir. Un court-métrage, Lon Chaney se maquille, précédait la séance de l’Inconnu.

On y voyait l’acteur se métamorphoser, à l’aide de maquillage et de quelques postiches : Quasimodo (l’un de ses rôles les plus célèbres) ou Abraham Lincoln, il est méconnaissable. On ne peut s’empêcher de penser à ces images lorsqu’Alonso se déshabille et révèle au spectateur son secret. Sous la chemise, un corset qui lui maintient les bras le long du corps.

Filmé de dos, ce déshabillage est troublant : le corps sans bras palpite tandis que peu à peu, son complice défait le corset, comme un amoureux dénouerait le laçage de la femme qu’il aime. Le corps se redéploye progressivement, faisant de l’homme-chenille un homme normal.

Normal ? Ce serait mal connaître Tod Browning, qui imagine pour son personnage une autre caractéristique physique proche du monstrueux : un double pouce à la main gauche, qui trahit l’identité de son possesseur.

Les passions, elles aussi, dépassent toutes les normes. Alonso n’est pas un amoureux transi ordinaire, un jeune romantique aux yeux suppliants et aux lèvres humides de tendresses non-dites. C’est un homme au visage dur, un criminel prêt à tout pour écarter son rival, l’Hercule du cirque.

La monstruosité qu’il affiche n’est que le reflet d’une âme noire, souillée par le crime. La caméra de Tod Browning scrute le visage d’Alonso, tour à tour ami joyeux et amant désespéré, criminel dangereux ou victime de sa passion.

On remarquera bien sûr quelques références à l’expressionnisme allemand : la salle d’opération du docteur, et son plafond d’une hauteur vertigineuse, où l’on défie le Ciel et l’Enfer. Mais la mise en scène frappe avant tout par sa simplicité.

Tod Browning sait nous faire frissonner, imaginant un numéro de lancer de couteau sur plateforme rotative, un affrontement simulé entre Alonso et sa belle qui annonce le numéro final. Le numéro et le montage s’emballent, les plans se succèdent rapidement pour suivre la vengeance d’Alonso.

Car le personnage apprend que la femme qu’il aime va en épouser un autre. Un autre avec des bras, lui, un autre qui ne connaît pas le goût du sacrifice. Alors il se met à rire.

En contre-champ, Nanon et son Hercule rient aussi, de joie. Alonso ne s’arrête plus, et dans ce rire mêlé de larmes, c’est toute l’âme humaine qui chavire. Une scène d’horreur qui est aussi une scène d’amour. Jamais on ne vit folie plus belle.

 

Anne Sivan         
deco
Nouveau Actualités Voir aussi Contact
deco
decodeco
• A lire aussi sur Froggy's Delight :

Pas d'autres articles sur le même sujet


# 14 avril 2024 : En avril, de la culture tu suivras le fil

Un peu de soleil, des oiseaux qui chantent, le calme avant la tempête olympique. En attendant, cultivons-nous plutôt que de sauter dans la Seine. Pensez à nous soutenir en suivant nos réseaux sociaux et nos chaines Youtube et Twitch.

Du côté de la musique :

"Kit de survie en milieu hostile" de Betrand Betsch
"Let the monster fall" de Thomas de Pourquery
"Etat sauvage" de Chaton Laveur
"Embers of protest" de Burning Heads
"Sin miedo" de Chu Chi Cha
"Louis Beydts : Mélodies & songs" de Cyrille Dubois & Tristan Raës
"Arnold Schönberg : Pierrot lunaire" de Jessica Martin Maresco, Ensemble Op.Cit & Guillaume Bourgogne
"C'est pas Blanche-neige ni Cendrillon" de Madame Robert
"Brothers and sisters" de Michelle David & True Tones
"Prokofiev" de Nikita Mndoyants
"Alas" de Patrick Langot, Alexis Cardenas, Orchestre de Lutetia & Alejandro Sandler
"Symptom of decline" de The Black Enderkid
"Tigers blood" de Waxahatchee
"Not good enough" de Wizard
et toujours :
"Le carnajazz des animaux" de Dal Sasso Big Band"
"Deep in denial" de Down To The Wire
"Eden beach club" de Laurent Bardainne & Tigre d'Eau Douce
"Ailleurs" de Lucie Folch
"Ultrasound" de Palace
quelques clips en vrac : Pales, Sweet Needles, Soviet Suprem, Mazingo
"Songez" de Sophie Cantier
"Bella faccia" de Terestesa
"Session de rattrapage #5", 26eme épisode de notre podcast Le Morceau Cach

Au théâtre

les nouveautés :
"Tant que nos coeurs flamboient" au Théâtre Essaïon
Notes de départs" au Théâtre Poche Montparnasse
"Les chatouilles" au Théâtre de l'Atelier
et toujours :
"Come Bach" au Théâtre Le Lucernaire
"Enfance" au Théâtre Poche Montparnasse
"Lîle des esclaves" au Théâtre Le Lucernaire
"La forme des choses" au Théâtre La Flèche
"Partie" au Théâtre Silvia Monfort
"Punk.e.s" Au Théâtre La Scala
"Hedwig and the angry inch" au théâtre La Scala
"Je voudrais pas crever avant d'avoir connu" au Théâtre Essaïon
"Les crabes" au Théâtre La Scala
"Gosse de riche" au Théâtre Athénée Louis Jouvet
"L'abolition des privilèges" au Théâtre 13
"Lisbeth's" au Théâtre de la Manufacture des Abbesses
"Music hall Colette" au Théâtre Tristan Bernard
"Pauline & Carton" au Théâtre La Scala
"Rebota rebota y en tu cara explota" au Théâtre de la Bastille
"Une vie" au Théâtre Le Guichet Montparnasse
"Le papier peint jaune" au Théâtre de La Reine Blanche
des reprises :
"Macbeth" au Théâtre Essaion
"Le chef d'oeuvre inconnu" au Théâtre Essaion
"Darius" au Théâtre Le Lucernaire
"Rimbaud cavalcades" au Théâtre Essaion
"La peur" au Théâtre La Scala

Une exposition à la Halle Saint Pierre : "L'esprit Singulier"

Du cinéma avec :

"Amal" de Jawad Rhalib
"L'île" de Damien Manivel
zt toujours :
"Le naméssime" de Xavier Bélony Mussel
"Yurt" de Nehir Tuna
"Le squelette de Madame Morales" de Rogelio A. Gonzalez

et toujours :
"L'innondation" de Igor Miniaev
"Laissez-moi" de Maxime Rappaz
"Le jeu de la Reine" de Karim Ainouz
"El Bola" de Achero Manas qui ressort en salle
"Blue giant" de Yuzuru Tachikawa
"Alice (1988)" de Jan Svankmajer
 "Universal Theory" de Timm Kroger
"Elaha" de Milena Aboyan

Lecture avec :

"L'origine des larmes" de Jean-Paul Dubois
"Mort d'un libraire" de Alice Slater
"Mykonos" de Olga Duhamel-Noyer
et toujours :
"Des gens drôles" de Lucile Commeaux, Adrien Dénouette, Quentin Mével, Guillaume Orignac & Théo Ribeton
"L'empire britanique en guerre" de Benoît Rondeau
"La république des imposteurs" de Eric Branca
"L'absence selon Camille" de Benjamin Fogel
"Sub Pop, des losers à la conquête du monde" de Jonathan Lopez
"Au nord de la frontière" de R.J. Ellory
"Anna 0" de Matthew Blake
"La sainte paix" de André Marois
"Récifs" de Romesh Gunesekera

Et toute la semaine des émissions en direct et en replay sur notre chaine TWITCH

Bonne lecture, bonne culture, et à la semaine prochaine.

           
twitch.com/froggysdelight | www.tasteofindie.com   bleu rouge vert métal
 
© froggy's delight 2008
Recherche Avancée Fermer la fenêtre
Rechercher
par mots clés :
Titres  Chroniques
  0 résultat(s) trouvé(s)

Album=Concert=Interview=Oldies but Goodies= Livre=Dossier=Spectacle=Film=