Opéras en un acte de Pascal Zavaro et Leonard Bernstein, direction musicale de Julien Masmondet, mise en scène de Catherine Dune, avec avec Éléonore Pancrazi, Laurent Deleuil, Morgane Heyse, André Gass et Philippe Brocard de l'Ensemble Les Apaches.
Belle idée que de rassembler dans la même soirée l'oeuvre très contemporaine de Pascal Zavaro, " Manga Café" (2018) et celle, déjà classique, de Leonard Bernstein, " Trouble in Tahiti" (1952).
Cette soirée permet en effet de confronter de jeunes chanteurs et de jeunes musiciens à deux répertoires, celui de l'ère électronique et celui de la comédie musicale triomphante.
Ils vont à chaque fois bénéficier d'un bel écrin, la bibliothèque Manga et la banlieue blanche années 50, conçues par Elsa Ejchenrand, et des costumes d' Elisabeth de Sauverzac joliment inspirés des figurines manga et de l'époque du cinéma scope technicolor. Quant à Catherine Dune, sa mise en scène est aussi fluide dans le monde bédé futuriste que dans celui du rêve américain pur sucre.
Deux fois quarante-cinq minutes rafraîchissantes et joyeuses dans des dispositifs habiles, menées tambour battant par des artistes lyriques appréciant de passer du moderne au classique, d'essuyer les plats avec une œuvre toute neuve de Pascal Zavaro et de se lancer avec cœur et virtuosité dans l'univers de Leonard Bernstein.
Œuvre bien antérieure à ses chefs d'oeuvre, "Trouble in Tahiti" aligne les "tubes potentiels" et les morceaux de bravoure nécessitant une interprétation exceptionnelle. Eléonore Pancrazi joue Dinah, la ménagère américaine, conditionné, soumise jusque dans ses choix cinématographiques. Quand elle raconte le film qu'elle a vu, "Trouble in Tahiti", Bernstein en fait un chant épique qui aboutit à un numéro de haut vol. Pareillement, Laurent Deleuil est Sam le mâle américain et cela s'entend dans un solo fracassant.
On a vu précédemment les mêmes en héros de manga presque transgenre et cela en dit long de leur capacité à tout chanter, à tout jouer. Leurs partenaires, Morgane Heyse, André Gass et Philippe Brocard sont également saisissants dans leurs transformations.
Accompagnés par l'Ensemble Les Apaches sous la direction musicale de Julien Masmondet, ils réussissent des performances de grande qualité et pas simplement comme chanteurs. Ils savent s'approprier des personnages différents dans deux spectacles dont la juxtaposition ne souffre pas contestation.
Personne ne regrettera pas d'avoir vu à la suite "Manga-Café" et "Trouble in Tahiti", montés avec une égale subtilité par Catherine Dune, car ce spectacle associant une création mondiale et un hommage à un grand nom du siècle passé, est incontestablement l'un des meilleurs de cette saison. |