Un livre considéré par le grand Will Self comme une révélation ne pouvait pas me laisser indifférent. C’est donc sur les conseils de l’ami Will que je me suis lancé avec curiosité dans le premier roman d’Amy Liptrot, L’écart, qui vient d’être publié chez Globe éditions. Et bien m’en a pris, L’écart aura été une bien belle découverte.
Amy Liptrot est une jeune auteure originaire des Îles Orcades, un archipel du Nord de l’Ecosse. Fille d’un père bipolaire touché par des crises maniaques et d’une mère très portée sur la religion, Amy Liptrot nous retrace dans son ouvrage son parcours et son combat contre l’alcoolisme. On suit d’abord son enfance sur ces îles écossaises, balayées par des vents permanents, son attirance pour le danger, symbolisé par ces ballades au bord des falaises puis sa descente aux enfers dans l’alcool.
L’alcool, elle va le découvrir quand elle décidera de quitter son île pour rallier Londres, la capitale des excès, où les drogues, l’alcool et le sexe sont les rois. Elle commence à boire très vite, à se droguer aussi et rentre vite dans des pratiques addictives. Elle découvre l’amour aussi, lors d’un concert, un amour qui ne survivra pas à sa dépendance à l’alcool.
A cause de son alcoolisme, elle va tout perdre, son travail, son logement et son amour. Ne lui reste plus qu’à tenter de se sortir de ce fléau qui la tue à petit feu. Elle se lance dans une cure de désintoxication à Londres puis décide de rentrer sur son île. Entre temps, quinze ans après son départ, ses parents se sont séparés et ont vendu la ferme familiale.
Pas facile donc, pour elle, que ce retour aux sources, tout en sobriété, qui va l’obliger à se construire une nouvelle vie. Elle va très vite retrouver un travail, retrouver son père et se réfugier dans la lecture, la marche et l’écriture. Evidemment l’alcool lui manque, un manque qui fait l’objet de magnifiques pages dans lesquelles on la voit se reconstruire dans le dépouillement total au milieu d’une nature austère et fragile.
J’ai compris, je pense, pourquoi Will Self avait pu voir dans ce livre une révélation. L’écart est un très beau livre, bien différent de ceux qu’on a l’habitude de lire qui traitent de l’alcoolisme. Servi par une écriture particulièrement lente jamais éprouvante, faite de descriptions lumineuses et profondes, le livre raconte magnifiquement le combat d’une femme contre l’alcoolisme et "l’écart" qu’elle choisit pour se reconstruire après des années de souffrances alcooliques. Amy Liptrot nous livre un formidable message d’espoir et de combat nous montrant qu’elle est parvenue à se redécouvrir mais aussi à redécouvrir les autres tout en redécouvrant le territoire de son enfance.
Amy Liptrot nous montre aussi que le sevrage alcoolique n’est jamais réellement acquis et qu’il demeure un combat perpétuel. Chaque jour passé sans alcool est une victoire pour elle, un passage vers la rédemption avec en toile de fond une nature sauvage et tourmentée superbement décrite par l’auteure.
L’écart est donc un livre magnifique, cette "révélation" que nous prétendait Will Self dès le départ. Il souffle un formidable vent d’espoir à la lecture de ce livre qui par sa puissance littéraire en a fait pour moi un véritable coup de cœur.
Ce livre, entre vos mains, ne pourra pas vous laisser indifférent. C’est une évidence. |