Paul Weller aura traversé les époques avec une incroyable et très estimable constance : du punk racé et mod de The jam, de la pop jazzy soul alanguie de The Style Council (on oubliera juste Respond le label qu’il fondera à la même époque) à des disques en solo mélangeant expérimentations, soul rock et pop. Le tout avec une certaine classe, voire même parfois avec une classe indéniable. Il possède, à cause de sa musique et de son engagement politique en Angleterre une aura toute particulière. Sa reconnaissance, si elle n’est pas négligeable reste néanmoins moindre dans le reste de l’Europe et aux USA.
A 60 ans, le musicien semble tourner une nouvelle page, une page de plus, de sa longue carrière. Une page plus intimiste, délicate et rêveuse et peut-être plus feutrée mais gardant une réelle intensité et fragilité sans tomber dans quelque chose de trop confortable. Un côté acoustique que nous lui connaissions déjà mais qui ne durait pas sur l’ensemble d’un album. Un album rappelant par la voix, la guitare et les arrangements habilement orchestrés un Nick Drake, ou en tout un cas un esprit très Anglais. Des arrangements finement ourlés donc, qui saisissent cette humeur mélancolique et qui atteignent leurs summums sur "Gravity", "Aspects", "White Horses" et surtout dans le superbe et très lyrique "May Love Travel With You". L’âge aidant peut-être, la nostalgie arrive au galop, et le temps est à la réflexion (la vie, la mort, la recherche de la paix intérieure, le sexe, le vieillissement, Bowie…).
Pour l’accompagner, quelques musiciens comme Erland Cooper, Martin Carthy, Danny Thompson, Lucy Rose, Rod Argent de The Zombies, Conor O’Brien de Villages ou encore Noel Gallagher (à l’harmonium), comme l’envie ou le signe de son ouverture aux influences extérieures. Cette page qui s’ouvre est peut-être la meilleure façon de clore, ce qui restera la discographie de l’un des musiciens Anglais les plus importants.