Monologue dramatique conçu par Cécile Backès et Margaux Eskenazi d'après le roman éponyme de Annie Ernaux interprété par Cécile Girard dans une mise en scène de Cécile Backès. Au centre d'un dispositif quadrifrontal où sont disposés les spectateurs, au milieu d'un amas de tables en bois contre lesquelles sont inclinées des chaises, la comédienne - chemisier à fleurs et pantalon noir - dévide soigneusement une ficelle de sa bobine. Comme l'écheveau de ses souvenirs.
Le visage fermé, comme pour elle-même sur un ton de reproche, elle s'adresse à "l'autre" : sa soeur absente (dont elle n'a su la présence que par hasard), morte avant qu'elle n'arrive et qu'elle n'a jamais connu. Les mêmes reproches qu'elle a essuyé en tant que fille unique.
Arpentant l'espace de part en part entre les tables dont elle sort des tiroirs une foule d'objets hétéroclites (vis, bougies, nappes, couverts...) qui sont des clés sur le chemin de sa mémoire, elle ne cesse de poser des questions. De se les poser à elle et de les poser à l'autre.
Dans une petite forme axée sur l'intime, Cécile Backès fait entendre par la voix de la comédienne Cécile Gérard, impeccable, ce monologue évanescent souvent chuchoté, comme s'il l'on était dans la tête de cette femme, et construit pour l'absente un vrai mausolée.
Avec un travail sur les souvenirs qui a donné lieu à une "création partagée" sur tout le territoire des Hauts de France avec, en parallèle du texte de "L'Autre fille", des lettres écrites par de nombreux anonymes (restituées dans un émouvant livret), ce spectacle a le mérite de faire partager ce texte d'Annie Ernaux au plus grand nombre dans une forme qui s'adapte aux différents lieux et permet, notamment grâce au parler très "populaire" de la comédienne, d'être entendu par un public nouveau qui peut se l'approprier.
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