Monologue dramatique écrit, mis en scène et interprété par Wajdi Mouawad. Wajdi Mouawad dans le rôle de Wahid, un auteur-metteur en scène qui lui ressemble étrangement. Celui-ci, revenu de la mort, s'adresse à la communauté des morts eux-mêmes (représentée par le public) et raconte son histoire à la recherche de son âme.
A la mort de son ami Robert Davreux, alors qu'il doit monter "Philoctète" (dans le cadre de l'intégrale des pièces de Sophocle) et que le projet se prépare, il n'a soudain plus aucune envie de le faire, trouvant la pièce sans intérêt et "ressassante". La tête rasée, en proie à une douleur inexpliquée, il se lance dans un vaste jeu de piste sur les traces des dieux dans la Grèce antique puis celle d'aujourd'hui.
Après l'exceptionnel "Tous des oiseaux", Wajdi Mouawad revient à un spectacle seul en scène et se livre ici, devant un écran, mêlant théâtre et cinéma à un voyage introspectif et sincère avec humour, clins d'oeil et autodérision.
Le spectacle (ou peut-être faudrait-il dire le film, tant la vidéo domine sans doute un peu trop l'ensemble) propose une réflexion pertinente et intelligente sur la création.
Mais s'il n'a pas la virtuosité de réalisation d'autres spécialistes du genre comme Katie Mitchell ou Christiane Jatahy, les images du metteur en scène-réalisateur, moins léchées et moins propres, n'en dégagent que plus d'émotion. Il propose même de jolies trouvailles, fait parler les chiens ou les objets et joue avec le passage de l'écran à la salle, métaphore du passage de la mort à la vie.
Au terme d'un voyage qui le conduira en Grèce où il écoutera notamment la jeunesse actuelle (une séquence particulièrement poignante sur les rêves qu'on leur a enlevés), Wahid finira par retrouver son âme, la comprendre et l'accepter. Et retrouvera par la même occasion, l'envie d'écrire et de créer, comprenant qu'il faut pour cela renouer avec le langage et la poésie.
"Inflammation du verbe vivre" est un spectacle salutaire dans lequel l'auteur retrouve toute sa verve. On ne lui en voudra donc pas d'avoir délaissé momentanément le théâtre pour continuer d'accomplir son travail d'artiste car au final, on ne s'ennuie pas et comme dans ses précédents opus, il parle de notre monde avec l'acuité qu'on lui connaît. Et c'est pour ça qu'on l'aime.
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