Comédie dramatique de Claude Ferri-Pisani, mise en scène de Isabelle Jeanbrau, avec Catherine Artigala, Martine Fontaine, Céline Lo Presti, Clément Olivieri et Grégory Vouland.
Claude Ferri-Pisani a écrit une fausse-vraie pièce anglaise plus anglaise que bien des vraies pièces anglaises. On y croise une danseuse de flamenco espagnole, Lola (Martine Fontaine) échouée en Angleterre et devant s'occuper de sa belle-mère (Catherine Artigala) qui n'a plus trop sa tête et ne pense qu'à manger, pendant que son mari, marin, écume les mers.
On est dimanche et Lola attend sa fille, Pakita (Céline Lo Presti... qui ne vient pas. Que lui est-il arrivé ? Que se passe-t-il ? Pourquoi n'a-t-elle pas prévenue de son retard ? Pendant ce temps-là, le voisin scout (Grégory Vouland) demande à cirer les chaussures de la maison... alors que Lola doit subir les assauts de son beau-frère (Clément Olivieri), fou amoureux d'elle.
Quand débute "La Danseuse du crépuscule", on peut être surpris par le ton décalé et les premières scènes baignant dans un absurde pince-sans-rire. Faut-il s'amuser des situations embarrassantes dans lesquelles se complait la belle-mère de Lola ou faut-il plaindre la danseuse d'être réduite au rôle de garde-malade ?
Il faudra donc un peu de temps pour saisir qu'on est devant un drame et pas une comédie, même si certaines scènes peuvent susciter de l'hilarité. "La Danseuse du crépuscule", c'est la vie sans avenir de Lola, au délicieux accent ibérique, condamnée à attendre son mari et la mort de sa belle-mère. Comment pourrait-elle, dans ce climat morose, se rêver encore sur un plateau à taper du pied et à tournoyer dans sa belle tenue d’apparat noire et rouge ?
Si la pièce de Claude Ferri-Pisani, qui n'en est qu'à ses premières représentations, mériterait peut-être quelques aménagements, elle n'est pas, néanmoins, dénué d'intérêt, notamment grâce à l'interprétation inspirée de Martine Fontaine qui compose une Lola fragile et fière, engluée dans l'Angleterre profonde, ainsi que celle de Catherine Artigala totalement à l'aise dans un personnage "borderline".
Peu à peu, on est conquis par un texte qui aboutit à un final émouvant et poétique, qui donne l'occasion à Lola de remettre ses habits de Lola. La mise en scène d'Isabelle Jeanbrau gagne en intensité. Si, dans les premières minutes,on peut ne pas accrocher et rester insensible au "second degré" de la pièce, celle-ci prend pourtant peu à peu son envol.
On pourrait presque oser dire que "La Danseuse du crépuscule" a un côté "Tennessee", que tous les personnages pourraient être pris dans des passions vaines et épuisantes comme souvent chez l'auteur d' "Un Tramway nommé désir", mais aussi se transfigurer, comme ce sera le cas pour Lola, la "danseuse-mère Courage".
0n espère que les spectateurs ne seront pas rebutés par le petit effort nécessaire pour "entrer dans la pièce" et se mettront à l'unisson de son univers un peu déroutant, car, au bout d'un moment, ils trouveront bien agréable la compagnie de Lola et de son petit monde. Quant à Pakita, il faudra être patient puisque le suspense qui lui colle à la peau (viendra-viendra pas) n'aura sa résolution que très tardivement... |