Pour le lancement de leur Festival 2005 à la Cigale, placé sous le signe de la chanson française, les Inrocks ne prenaient pas grand risque avec les deux talents confirmés que sont Alexis HK et Dionysos, ce dernier figurant d'ailleurs sur l'affiche du festival en 2002..
Côté nouveautés, pour ouvrir le feu, Joseph d'Anvers œuvre dans la chanson intimo-réaliste qui, à première écoute, ne présente pas de singularité remarquable.
En intermède, un inconnu avec une casquette et une chemise de bûcheron canadien et Czir, qui vient de la Drôme précise-t-il, qui écrit des chansons, minimalistes, surtout pour lui. Soit.
Un point commun entre ces nouveaux venus remarqués par les Inrocks : le retour de l'harmonica.
La Cigale est bondée à craquer et les premiers rangs de la fosse n'ont de voix que pour réclamer Mathias, le leader de Dionysos, attendu comme le messie. Mais c'est Alexis HK qui arrive.
Ce dernier remarque, avec un peu d'ironie, cet engouement obsessionnel et précise qu'il va nous dispenser un concert énergique, puissant et vibrant pour préparer le public à celui de Dionysos. Pari tenu. Lui qui affectionne le contact avec le public entre les chansons va réduire ses apartés au minimum pour dispenser un set imparable d'une intensité ravageuse qui va scotcher le public. Car en deux albums, Belle ville et L'homme du moment sorti cette année, il s'est fait plus qu'un prénom avec une voix chaude, une écriture charnelle et caustique et une prestance scénique à la Montand. En costume cravate sombre, look gendre idéal, Alexis K attaque avec "Nous sommes revenus" qui séduit immédiatement le public pour enchaîner sur un "Gaspard" sur des arrangements latino totalement exubérants.
Vient ensuite un "Coming out" terriblement émouvant qui finit en pied de nez. Le "Je leur dirai plus tard que je suis de droite" devient "Je leur dirai plus tard que je suis délégué UMP au conseil général des Hauts de Seine" déchaînant la liesse générale.
Puis, avec ses musiciens survoltés (Grégoire Riou, Marc Riou, Philippe Letang et Peyo Lissarague), il nous dispense un rap mémorable qui dérape sur une imitation cabrellisante avant de recevoir son invité, Bertrand Belin, qui vient de sortir son premier album et qui sera sur cette même semaine dans une semaine, pour chanter en duo guitare/banjo le superbe "La prunelle de mes yeux" qui lui permet de s'aventurer sur des rythmes plus swing avant de partir pour une ballade moyennageuse avec une nouvelle chanson.
Final avec un "C'que t'es belle" apocalyptique pour un concert impeccable qui reçoit une très chaleureuse ovation du public. Voici enfin venu le moment tant attendu du concert de Dionysos qui dès son entrée sur scène reçoit une ovation magistrale.
Mathias, ce diable de petit bonhomme tout de noir vêtu, fait une entrée fracassante sur fond de décor à la Tim Burton. La scène n'est pas assez grande pour lui qui saute dans tous les sens, frénétique, vibrionnant, au point qu'il monte sur les enceintes pour mieux voir le public de la fosse, sorte de rite préparatoire à ses désormais fameux sauts de l'ange pour un slam dont il a le secret et qu'il fera à plusieurs reprises à la plus grande joie du public.
Dès son entrée mélodramatique sur les premiers accords de "Giant Jack", premier titre de leur dernier album Monsters in love, le concert prend une tournure frénétique qui ne s'achèvera qu'une heure plus tard dans un maelstrom sonique.
Tous les musiciens, avec en tête la frêle Babet , qu'elle soit au violon, au chant ou au violoncelle utilisé comme une guitare, sont survoltés et chaque morceau composé de brusques montées en déclenchent le délire dans la salle bien décidée à pogoter. Un concert fort, puissant, ahurissant de virtuosité.
Dionysos nous offre le meilleur de son dernier opus, "L'homme qui pondait des oeufs", "Tes lacets sont des fées" et "Mon ombre est personne" et Mathias comme le Mickey de Fantasia nous entraîne dans une extravagante et tumultueuse chevauchée onirique. Mais il sait aussi prendre le temps de se poser pour "Neige" qu'il dédie à son père.
Et fait exceptionnel, il y aura un rappel avec "Tokyo Montana" au cours duquel Mathias fera le tour de la salle en slam et sera hissé par les mains au balcon, faisant confiance au public, et debout au bord du balcon chantera a cappella avant de redescendre par la même voie suspendu dans le vide.
Mathias a survolé la Cigale.... |