Réalisé par Marta Bergman. Belgique. Drame. 2h01 (Sortie le avril 2019). Avec Alina Serban, Tom Vermeir, Rebeca Anghel, Marian Samu, Viorica Tudor, Johan Leysen, Karin Tanghe, Jonas Bloquet et Mitika Samu.
S'il n'y avait rien d'autre de notable qu'elle dans "Seule à mon mariage" de Marta Bergman, la présence lumineuse d'Alina Serban dans le rôle de Pamela suffirait à conseiller ce film belgo-roumain.
Mais Marta Bergman, documentariste qui passe ici à sa première fiction et qui connaît bien la communauté rom, sait rendre vraie la vie de ses personnages, réussit à planter le décor de leur existence aléatoire avec de petits détails et sans sombrer dans le pathos pour décrire leur misère noire.
Mieux, elle parvient à rendre crédible le basculement de Pamela dans la belgitude moyenne et la résolution de l'histoire de cette jeune rom qui se rêvait femme d'intérieur occidentale, est logique, évidente et dénuée du moindre jugement de valeur.
Pamela, toute jeune femme, et déjà maman, vit avec sa grand-mère et sa fille au fin fond d'une banlieue rurale d'une ville roumaine.
Elle investit ses maigres économies dans un site de rencontres dans le but de refaire sa vie passablement sans perspectives en se mariant à un Européen en mal d'amour. Elle jette toutes ses forces morales et intellectuelles dans cette aventure et, miracle, elle "séduit" un Belge bien sous tous rapports.
Quittant mère et fille, elle se retrouve aux côtés de Bruno, un grand gaillard pas loin de la quarantaine et qui n'a pas su couper vraiment le cordon ombilical avec papa et maman. Toute la seconde partie de "Seule à mon mariage" de Marta Bergman est l'histoire d'une "sauvageonne" qui découvre la réalité du mode de vie post-industriel dans les villes de grande solitude de l'Union européenne.
Alina Serban, actrice instinctive, capable de passer en quelques secondes de l'hystérie à la mélancolie, compose une inoubliable Pamela, qui laisse sa fille sans se retourner, sans savoir ce qu'elle va devenir.
Face à elle, Bruno, son "promis", est joué par l'excellent Tom Vermeir, tout en nuances dans ce rôle de garçon souriant et bonace. Viorica Tudor, la grand-mère, est formidable en vieille chanteuse mal embouchée et déclinante qui s'occupe d'une petite-fille qu'elle feignait de ne pas aimer.
Dans une Roumanie plus vraie que nature, océan de pauvreté impensable, on sent un élan de vie qui fait défaut à l'autre Europe, celle qui prépare le mariage de Bruno et de Pamela, avec écran plat géant comme symbole d'une vie morne.
Qu'on ne s'y trompe pas, "Seule à mon mariage" de Marta Bergman n'est pas un film manichéen. Chacun y a ses raisons, traîne derrière lui un passé immémorial dont on ne sort pas comme ça. Il ne suffit pas d'un clic d'ordinateur et d'une conversation par "Skype" pour que les différences s'effacent et qu'un conte de fée s'enclenche.
Pourtant, il y a des erreurs qui rendent forts et des départs qui scellent un destin. Pamela est en marche vers le sien. Elle l'a choisi. Et, au final, Il y a peut-être enfin de l'amour dans ce qui ressemble de loin à de la simple fatalité "classique".
|