Comédie dramatique de Bernard-Marie Kotès, mise en scène de Charles Berling, avec Mata Gabin et Charles Berling.
Tout a été dit sur "Dans la solitude des champs de coton", certainement l'une des pièces de Bernard-Marie Koltès les plus jouées.
Toutes les combinatoriques ont été aussi tentés pour décrire le duo dealer-client qui va entamer une transaction dans la colère et l'achever dans la discussion : deux hommes, deux femmes, un homme une femme. Avec aussi, outre les sexes, possibilité de mêler les races, les classes et les âges...
Dans la version proposée par Charles Berling, fondée sur les évidences, les choses sont d'emblée claires. Le dealer est une dealeuse noire à capuche, le client un blanc en costume cravate (mais avec baskets).
L'homme (Charles Berling) est debout presque parmi le public sur un "pont" de bois qui enjambe la scène. La femme (Mata Gabin) est sur la grande scène quasi déserte si l'on excepte une structure métallique genre grande passerelle en construction ou à l'abandon dans un no man's land propice au deal.
La discussion s'engage aussitôt sans temps mort pour une joute qui durera à peine une heure. Dans cette pièce qui n'est peut-être au fond qu'une variation musicale, Charles Berling a choisi deux solos qui se répondent. On pourrait dire qu'on est devant deux interprètes de "free jazz".
Reste à jauger cette musique : d'aucuns la trouveront peu inspirée, d'autres apprécieront qu'on l'entende avec limpidité. D'aucuns reprocheront aux deux partitions d'être inégales, avec un Berling très acteur face à sa partenaire plus atone, moins à l'aise sur une scène où elle ne peut pas chuchoter mais doit d'abord lancer le texte pour jouer à l'unisson d'un grand professionnel. D'autres trouveront cette situation déséquilibrée et chaotique bien en phase avec le propos de Koltès.
Quoi qu'il en soit, le travail proposé par Charles Berling a le mérite de faire le point avec netteté sur ce que veut dire "Dans la solitude des champs de coton".
Moment poétique ou logorrhée déjà datée, les spectateurs choisiront définitivement leur camp entre ceux qui viendront voir et revoir encore et toujours ce "classique" et ceux qui l'auront également définitivement classé parmi les œuvres surfaites qui ne méritent pas tant d'honneurs. |