Quelques semaines seulement après avoir chroniqué son ouvrage Alarm ! consacré au débarquement, je me retrouve de nouveau avec un ouvrage de Benoît Rondeau entre les mains. Celui-ci, un bon pavé de 430 pages est consacré aux soldats de l’armée d’Hitler avec pour titre Etre soldat de Hitler. Publié aux éditions Perrin, il nous offre un éclairage inédit sur ces soldats allemands qui ont servi Hitler.
De nombreux ouvrages ont été consacrés aux campagnes et batailles menées par l’armée allemande au cours de la Seconde Guerre mondiale. Il restait à étudier la manière dont cette guerre a été vécue par les soldats allemands, et ce, quel que soit le corps auquel ils appartenaient. De nombreuses questions se posent. Quel était leur quotidien ? Dans quelles conditions ont-ils servi au front ou à l’arrière ? Etaient-ils avantagés par rapport à leurs adversaires ?
Dans cet ouvrage, la question des compromissions de l’armée avec le régime nazi est centrale. Etre un soldat de la Wermacht ou de la Waffen-SS au service d’Hitler, est-ce être un soldat comme les autres ? L’ouvrage accorde ainsi une place importante au degré de nazification de cette armée, à la questions des relations avec les populations civiles et à son rôle dans les crimes du troisième Reich.
Après une courte introduction dans laquelle il nous précise la diversité des situations quand on est soldat d’Hitler, Benoît Rondeau nous présente la formation et la discipline régnant dans l’armée d’Hitler. Les futurs soldats sont formés dès leur plus jeune âge, ils entrent dans la vie militaire en intégrant la Kaserne puis doivent faire face à une discipline de fer une fois la Wermacht intégrée. Le premier chapitre est aussi l’occasion pour le lecteur de découvrir les entraînements des soldats, d’y voir le rôle des officiers et des sous-officiers, de s’intéresser à la place des femmes dans cette armée et de voir la place de l’idéologie nazie à l’intérieur de cette armée.
Les deux chapitres suivants sont consacrés à la guerre sur terre avec dans un premier temps une partie consacrée aux conditions matérielles et à la vie quotidienne au front. Le texte est précis, étudiant l’alimentation des soldats, s’interrogeant sur l’utilisation de drogues, sur l’organisation des soins et le moral des soldats. Evidemment, les conditions ne sont pas les mêmes que l’on soit sur le front est ou en Afrique du Nord. Traiter la guerre sur terre, c’est aussi nous raconter les conditions de combat, objet du chapitre 3. Evidemment, Benoît Rondeau nous parle de la Blitzkrieg qui fit ses preuves pendant la première phase de la Seconde Guerre mondiale, nous montre l’importance du panzer dans cette armée, pourtant faiblement motorisée.
Le chapitre 4 est consacré à la guerre aérienne, aux hommes d’Hermann Goering et à cette Luftwaffe qui joua un rôle prépondérant dans la Blitzkrieg. Il est alors l’occasion de parler des radars qui furent une des grandes innovations de la Seconde Guerre mondiale, avec une Allemagne située à l’avant-garde de cette technique à l’époque. Benoît Rondeau, enfin, nous montre que la luftwaffe disposait de forces de combats terrestres très importantes.
Un chapitre est ensuite consacré à la guerre sur mer au travers de la Kriegsmarine, l’auteur nous montrant sa difficile coopération avec la luftwaffe. Plus d’un million d’Allemands vont servir au sein de cette Kriegsmarine qui en 1939 aligne 57 U-boote. Un individu incarne l’arme sous marine allemande, l’amiral Dônitz qui jouit de la confiance d’Hitler qui en fera son successeur dans un Reich en pleine agonie en avril 1945.
Le chapitre six est consacré aux soldats de Hitler et aux civils. Particulièrement intéressant, ce chapitre nous montre les liens entretenus entre les soldats et les civils grâce aux courriers. Ces courriers permettent aux soldats de garder le moral et apporte du réconfort à leurs familles. Benoît Rondeau évoque ensuite les permissions des soldats allemands qui deviennent de plus en rares au fil de la guerre. Etre soldat de Hitler, c’est aussi être au contact de populations civiles dans des pays occupés. L’ouvrage nous montre le quotidien de ces soldats avec les civils, notamment à Paris, la ville lumière pour les soldats allemands. Il nous montre les situations différentes selon l’endroit, avec des tensions sur le front Ouest, des relations un peu plus amicales en Afrique du Nord et un racisme important sur le front est.
Le chapitre sept s’intéresse aux crimes perpétrés par les soldats de Hitler. L’armée a pris une part directe dans les crimes sans précédent commis au nom de l’idéologie nazie. Ils ont accepté les entreprises génocidaires du troisième Reich. Partout en Europe, ces soldats ont œuvré et semé la mort sur leur passage. Le crime le plus important imputable à la Wermacht est celui perpétré à l’encontre des prisonniers de guerres soviétiques. Les civils soviétiques n’ont pas non plus été beaucoup épargnés, au nom de l’idéologie nazie. Les soldats enfin, ont été les complices de la shoah en Union soviétique. Dans ce chapitre, Benoît Rondeau, toujours aussi précis, aborde le cadre de méfaits inconnus de la Wermacht en Italie, après la signature de l’armistice avec les alliés.
Le dernier chapitre est consacré à l’après Hitler, à la postérité d’une armée controversée. L’auteur nous renseigne sur la façon d’encaisser et d’accepter la défaite. De nombreux soldats se retrouvent en captivité, d’autres retournent à la vie civile refoulant leur passé en niant toute forme de culpabilité.
Etre un soldat de Hitler est donc un ouvrage complet, extrêmement précis qui retrace de façon limpide les parcours diversifiés des soldats allemands, sous toutes les latitudes, du général au pilote, de l’administrateur au tankiste de panzer. C’est un ouvrage érudit et passionnant, fruit d’un travail de recherche important qui nous éclaire sur ces hommes qui prêtaient serment de fidélité absolue à Hitler lors de leur incorporation à l’armée allemande. |