La version française du Levitation est devenue en quelques années le rendez-vous des amateurs de rock lysergique et / ou psychédélique. Idéalement placé vers la troisième semaine de septembre, il se situe à distance raisonnable des gargantuesques festivals estivaux et propose, pendant deux deux jours, une programmation pointue et de qualité.
Après des années d’hésitation constante et malgré une programmation souvent alléchante, cette édition 2019 marque donc ma première venue au Levitation. Depuis peu, le festival a été déplacé au Théâtre Le Quai, en plein centre-ville d’Angers. L’endroit est convivial et se compose de deux salles : le T400, équivalent de la grande scène, où l’on peut voir les "têtes d’affiches", et le forum, qui rappelle un esprit club un peu plus sombre et intimiste. L’endroit est idéalement placé près de La Maine et avec la chaleur étouffante de cette fin d’été on voit fleurir de nombreux attroupements prenant l'apéro avant d’aller profiter des concerts. De nombreux foodtrucks sont également à disposition des festivaliers. L’accès aux différents bars est fluide, le festival est sans conteste convivial.
A peine arrivés, on se laisse enveloppés par le rock lourd et narcotique des Warlocks. A défaut de proposer du neuf, les Américains déroulent leur set avec précision et efficacité, mais il sera difficile de résister à une première pinte avant la fin de leur prestation.
Quelle bonne surprise de revoir Black Midi ! Un mois plus tôt, à Saint-Malo, la sensation rock arty poly-rythmique avait un peu déçu : sorti de l’impressionnant batteur, le groupe avait offert une prestation brouillonne et foutraque : un Sonic Youth première période mal dégrossi. Ce soir, l’ensemble paraît plus maîtrisé, plus en tension, plus habité. Comme quoi il est primordial de donner une seconde chance à un groupe qui vous a à moitié déçu.
Les habitués (les fans) des Frustration en auront eu pour leurs sous. Comme souvent, le public est largement acquis à leur cause et le groupe semble prêt à assurer le service après-vente de son album à paraître. Les Parisiens ne réinventent pas la roue mais leur post-punk tendu ravit les premiers rangs et les fans de pogo et les tentatives avortées pour certains de crowd surfing.
Dans le lointain souvenir d’un festival d’été, les Danois d’Iceage m’avaient laissés un impression de jeunes gredins élevés au punk revêche et sauvage. Au fil de leurs albums, le groupe s’est un peu assagi, apportant des nuances à son rock à guitares acérées. Leur concert de ce soir est à l’image de leur discographie : intrigant, déconcertant mais carrément efficace.
Cette première journée se termine avec les Fat White Family en grande forme. On sera toujours étonné par la capacité des ces grands corps chétifs voire maladifs à électriser les foules avec autant d’ardeur.
Samedi, le temps est à l’orage et une tension sourde baigne dans l’air angevin. L’endroit le plus électrique de la ville reste le Théâtre du Quai. La soirée commencera en douceur avant les multiples déflagrations au programme ce soir. Les Anglais de Vanishing Twin sont parfaits pour ce début de soirée. Leur pop aventureuse et fûtée n’est pas sans rappeler le meilleur de Stereolab avec qui ils ont déjà partagé quelques scènes. Sur le chemin du bar, on se faufile vers les premiers rangs de l’intrigant France et ses drones hypnotiques à base de vielle à roue. Ambiance quasi chamanique et transe hypnotique, l’expérience valait clairement ce petit détour.
En attendant le super groupe de la soirée, L’Epée, j’essaie une pédale du guitare au stand d’un marque française qui en fabrique des plutôt chouettes (Collision Devices).
Les Frankie and the Witch Fingers, sympathique groupe californien qui tente de sucer la roue de The Oh Sees, offrira un concert énergique sans vraiment de temps morts. Mais l’impression de clone au millimètre de la bande à Dwyer rend l’ensemble vaguement sympathique.
Pour son premier concert, le "super groupe" de la soirée composé d’Anton Newcombe, d’Emmanuelle Seigner et des Liminanas n'aura pas déçu : une concert assez tendu et moins pop que sur disque. Emmanuelle Seigner tentera tant bien que mal de faufiler son brin de voix dans le dédale sonique de ses comparses.
Si je regrette de ne pas avoir mis les pieds avant au Levitation, cette première expérience appellera sans nul doute de futures idées de week-end aux alentours de la troisième semaine de septembre.

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