Spectacle musical conçu par L. (Raphaële Lannadère), mise en scène de Thomas Jolly, avec L., Thomas Jolly et Babx.
L., Thomas Jolly et Babx, c'est un trio gagnant qui a conçu "Un jardin de silence", spectacle musical hommage à la "longue dame brune" comme la surnommait Georges Moustaki. En une centaine de minutes, cette association de talents s'approprie corps et âme la chanteuse "mystérieuse" selon les dires de ces journalistes qui sont ici gentiment moqués. Car pour conter la vie chantée de Barbara, L. et ses deux acolytes ont choisi la forme d'un bout-à-bout d'interviews qui s’entremêlent avec les chansons choisies et interprétés. Thomas Jolly, d'une voix facétieuse de faux journaliste sentencieux et mondaine, se charge des questions et L., lunettes noires et tenues sombres mais pas forcément "barbariennes", y répond avec les mots et le phrasé de Barbara. C'est dire si ses interventions font mouche : toujours honnête et précise dans ses réponses, celle qui refusait d'être traitée d'intellectuelle ne se moque pas de ses interlocuteurs mais leur cloue le bec avec son profond bon sens. Comme on le verra dans le spectacle, avec une magnifique interprétation de L. de "La Solitude", Barbara pouvait être une statue pétrifiée d'angoisse, elle n'en restait pas moins éternellement drôle et chaleureuse avec tous ses intervieweurs, même les plus imbus de leur science du questionnement. Dans un décor de lis et de fauteuils Louis XV, évoquant ce "jardin de silence" de Précy-sur Marne où vivait Barbara, défile la vie de la chanteuse. Sans chercher une ressemblance physique mimétique avec son personnage, et surtout en essayant de ne pas l'imiter vocalement (ce qui est une prouesse) mais de la restituer au-delà de toute imitation, L. ne s'est pas facilitée les choses. Elle s'en sort superbement qu'elle chante les classiques du début du siècle que Barbara affectionnait ("Les amis de Monsieur" de Fragson, "Les petits gâteaux" de Vincent Scotto) ou son répertoire. Il faut ajouter que L et ses camarades ont eu l'intelligence de ne pas piocher dans les "standards" comme "L'aigle noir" ou "Gottingen". Ils ont même poussé la distanciation jusqu'à chanter du Léo Ferré et l'on n'oubliera pas la très réussie version de "La Vie d'artiste" interprétée par Thomas Jolly qui ne s'est pas contenté d'ordonner ce spectacle dans un savant désordre. Des cabarets aux tournées finales où Barbara devint l'humble prêtresse de la lutte contre le Sida, tout y est. Raconté et chanté avec simplicité pour transmettre à d'autres un portrait sensible de cette femme. On remerciera le trio dont aucun ne tire la couverture vers lui et où chacun contribue à la beauté de l'ensemble, comme Babx, sage derrière son piano mais capable de restituer "Parce que je t'aime" à sa manière, une très belle manière que la grande dame aurait certainement adoubé. "Un jardin de silence" est un spectacle généreux qui ne prétend à rien d'autre qu'à entretenir une flamme qui ne vacillera jamais dans le cœur de tous ceux qui aiment et aimeront cette femme inoubliable. |