Spectacle de théâtre musical conçu par Marie-Céline Lachaud sur une musique de Nicholas Skilbeck, mise en scène de Patrick Alluin, avec Mathilde Hennekinne, Sébastiao Saragamo et Baptiste Famery accompagnés au piano par Jonathan Goyvaertz.
Transformer la guerre de 1940 en comédie musicale, c'est le défi auquel Marie-Céline Lachaud s'est attelée en écrivant "Quand la guerre sera finie".
Bien entendu, elle a dû composer toute une série de personnages attendus, de l'Allemand lettré au résistant communiste en passant par la chanteuse de cabaret ou les porteurs de valises du marché noir.
Pourtant, elle a tenu son pari et le récit qu'elle a conçu est haletant, riche en péripéties et aucun personnage n'est une caricature. Preuve s'il en est de sa réussite : elle ne lorgne jamais du côté du "Le Repas des fauves" pas plus qu'elle ne guigne vers "Papy fait de la Résistance".
Sans doute faute de moyens, Patrick Alluin, le metteur en scène, s'est résigné à faire jouer la douzaine de personnages à seulement trois comédiens. Grâce à beaucoup d'astuces, comme par exemple des changements de costume pour Mathilde Hennekinne qui se résument à transformer son foulard rouge en serre-tête pour passer de Lucile à la chanteuse Nini, le spectacle est rythmé et on ne se perd pas à savoir qui est qui.
Bien sûr quand Baptiste Famery devient Rupert, il revêt une veste d'officier allemand qu'il quitte instantanément pour devenir cheminot. Quant à Sébastiao Saramago, en quittant ses lunettes de chef de la résistance, le voilà prêt pour se transformer en fils de Nini...
Aidé par la scénographie de Thierry Good, qui a conçu un élément de décor central en bois, à la fois aiguillage et balustrade de pont, les trois interprètes vont et viennent sur scène, presque toujours chantant à la manière des comédies musicales de Jacques Demy et de Michel Legrand.
Ils sont accompagnés généreusement par Jonathan Goyvaertz qui ne quitte jamais son piano et donne ainsi l'impression qu'on suit un film se déroulant sous l'occupation.
La riche partition du britannique Nicholas Skilbeck, grand nom de la scène musicale outre-Manche dont c'est ici la première collaboration avec une auteur francophone, crée un climat de plus en plus tendu et ce n'est pas un hasard s'il se réclame de Bernard Hermann, le compositeur des films d'Hitchcock.
Les chansons, d'abord plutôt gaies ou amusantes, deviennent sombres au fur et à mesure que les résistants sont traqués par les nazis. Elles accentuent la tension dramatique d'autant plus que les trois comédiens sont également d'excellents chanteurs. La performance physique et vocale qui leur est demandée pendant presque deux heures est intense et, il faut le souligner qu'ils la maintienne jusqu'au bout, dans un final de toute beauté où l'émotion est à son comble.
On imagine ce que donnerait "Quand la guerre sera finie" sur une grande scène avec une distribution où chaque rôle serait attribué à un seul comédien-chanteur.
Mais pour l'heure, dans cette version "de combat", tout concourt à un spectacle magistral qu'on n'oubliera pas. On soulignera particulièrement la prestation de Mathilde Hennekinne, impériale dans trois rôles difficiles. |