Seul en scène écrit et mis en scène par Tatiana Gousseff et interprété par Marité Blot.
Marie-Yolande, la comédienne qui raconte son histoire et qui ressemble sans doute autant à Tatiana Gousseff, l'auteure et metteuse en scène, qu'à Marité Blot, la comédienne, est une femme qui, comme toutes les Bretonnes montées à Paris, préfère la Fnac Montparnasse à toutes les autres.
Et c'est peu dire qu'elle l'a fréquentée depuis qu'elle a quitté la ferme familiale et Rennes où elle a fait ses études de comédienne...
Mais pas, comme on penserait, pour acheter ce qu'on appelle depuis quelques dizaines d'années des auto-fictions, genre auquel "Bien arrivée à Ottawa" se raccroche.
Non, même si elle cite "La Place" d'Annie Ernaux et que son histoire de fille de paysans voulant partir de son horizon réduit à des parents aimants et à quatre frères un peu envahissants pour la seule fille de la fratrie, est assez voisine de celle de la Nordiste. Marie-Yolande, elle, connait plutôt le rayon "développement personnel".
C'est qu'elle est atteinte d'une phobie pas si commune que ça : la phobie automobile. Plus question pour elle de monter dans une voiture, ce qui est gênant quand on doit, comme les productions le répètent venir sur les lieux de tournage par ses "propres moyens".
Assise à son petit bureau ou debout, Marité Blot raconte avec modestie et sans emphase sa petite histoire. Elle n'en fait pas un fromage. On entendra Alain Chamfort (première manière) et l'on verra sur une toile blanche un vieux "Rendez-vous du Dimanche" avec un tout jeune Michel Drucker... et une toute gamine Jodie Foster post-Taxi Driver.
Tout ça pour que Marie-Yolande/Marité dise sans élever la voix qu'elle aussi aurait pu jouer dans le film de Scorsese. On ne rit pas aux éclats avec ses petites anecdotes mais on l'écoute attentivement poser chaque petite pièce de son puzzle pour que l'on comprenne que sa "vie minuscule", au sens de Pierre Michon, n'a rien à envier à celle des stars qui sont venus sur le divan rouge de Drucker. Si on voulait faire une comparaison qui n'est pas un mince compliment, on n'est pas loin de ce que fait Mohamed el Kathib quand il raconte sa mère ou sa R12...
On passe donc un joli moment dans l'intimité pas toujours rigolote de cette actrice imaginée par Tatiana Gousseff et parfaitement campée par Marité Blot.
Contrairement à bien des spectacles surchargés et cherchant par tous les moyens à enfoncer les clous dans la tête de leurs spectateurs, quand on sort de "Bien arrivée à Ottawa", la bulle n'éclate pas et restent en mémoire toutes les micro-aventures de Marie-Yolande. Mine de rien, on est devenu un de ses intimes et on ne le regrette pas. |