Spectacle conçu par Krzysztof Warlikowski et Piotr Gruszczynski d'après un opus de Hanokh Levin, mise en scène de Krzysztof Warlikowski, avec Agata Buzek, Andrzej Chyra, Magdalena Cielecka, Ewa Dalkowska, Bartosz Gelner, Maciej Gasiu Gosniowski, Malgorzata Hajewska-Krzysztofik, Jadwiga Jankowska-Cieslak, Wojciech Kalarus, Marek Kalita, Dorota Kolak, Rafal Mackowiak, Maciej Stuhr, Zygmunt Malanowicz, Monika Niemczyk, Maja Ostaszewska, Jasmina Polak, Piotr Polak, Jacek Poniedzialek et Magdalena Poplawska Depuis longtemps sinon toujours, la Pologne constitue l'unique tropisme warlikowskien, de manière patente, en filigrane ou en résonance.
Car le passé historique du pays natal du metteur en scène Krzysztof Warlikowski a suscité une névrose obsessionnelle confortée par la situation de la Pologne contemporaine considérée comme en voie de repli réactionnaire avec la résurgence aigüe des atavismes anciens, sinon de fascisation.
Un pays dans lequel l'exil, souhaité, espéré ou décidé, semble constituer la seule échappatoire possible et où Krzysztof Warlikowski, qui est parti puis revenu, maintient son ancrage dans le théâtre de résistance avec la troupe du Nowy Teatr de Varsovie dont il assure la direction.
Dans le cadre de cette dialectique du départ, il a été inspiré par un opus du du dramaturge Hanokh Levin, figure majeure de la scène israélienne contemporaine, "Sur les valises", pour élaborer, avec la collaboration du dramaturge compagnon de route théâtrale Piotr Gruszczynski, une variation tragi-comique irriguée d'autres emprunts textuels. Intitulée "On s’en va", elle reprend l'essentiel de la partition originale sous titrée "comédie en huit enterrements" en ce qu'elle retrace, avec l'aller-retour de certains et les autres qui, selon l'expression triviale, partent "les pieds devant", le drame de la petitesse et de la finitude humaines à travers le destin d'habitants d'un microcosme communautaire et identitaire confiné qui rêvent tous d'une vraie vie ailleurs celle-ci se trouvant dans un hypothétique au-delà où se dégustent des glaces aux flocons de neige. Introduite par le millésime 1998 du Concours Eurovison de la chanson remporté par Israël avec la chanson interprétée par la transgenre Dana International et se clôturant sur le ghetto de Varsovie avec la quête des origines d'une vlogueuse juive américaine, le spectacle se déploie selon les fondamentaux dramaturgiques et les marqueurs scéniques warlikoswkiens dont la radicale esthétique burlesque voire grotesque dans un décor de salle d'embarquement d'aéroport réalisé par la scénographe attitrée Malgorzata Szczesniak.
Dans cette métaphore de la vie, un stand-by plus ou moins long pendant lequel chacun traîne ses valises avant l'ultime sortie, et sous le regard clos d'un Dieu métis, indifférent aux affres de ses créatures que seule émeut l'éclosion d'une fleur, et la sollicitude ancillaire d'un séraphin qui a troqué son allure d'angelot pour celle d'un queer bodybuildé, se déploient les micro scènes façon "short cuts" d'histoires entrelacées délivrées sur le fil musical tonitruant du compositeur Pawel Mykietyn. Pas de doute possible, ce festival cabarettique explosif et désillusionné, au demeurant genre prisé par Hanokh Levin, ressort au spectacle-manifeste et s'avère donc un spectacle-signature porté par l'époustouflante interprétation performative des comédiens, fidèles aguerris et jeunes prometteurs.
|