Réalisé par Harry Kümel. Belgique/France/Allemagne. Fantastique. 1H36 (Sortie 11 mars 2020 – 1ère sortie 1971). Avec Delphine Seyrig, John Karlen, Danielle Ouimet, Andrea Rau, Paul Esser, Georges Jamin, Joris Collet et Fons Rademakers.
En 2009, Julie Delpy mettait en scène et interprétait "The Comtess", personnage sulfureux, sorte de Dracula au féminin, qui fut accusée au dix d'avoir torturé et assassiné de jeunes vierges. Elizabeth Bathory, dite "la comtesse sanglante", fut selon la légende emmurée vivante dans une pièce de son château.
C'est ce même personnage devenue une femme vampire se jouant de l'éternité qu'interprète Delphine Seyrig dans "Les Lèvres rouges" de Harry Kümel, cinéaste belge qui réalisa une petite dizaine de films dont le plus célèbre, "Malpertuis" avec Orson Welles baigne lui aussi dans un climat d'horreur.
La ressortie de ce film est l'occasion de se rappeler que la Belgique a toujours été un terrain d'élection du fantastique et du surréalisme.
Tourné principalement à Ostende et à Bruges en hiver dans des grands hôtels déserts,"Les Lèvres rouges" évoque des artistes comme Léon Spiellaert. Bien qu'en couleurs, le film joue subtilement des contrastes entre les noirs et les blancs, se permettant d'y adjoindre de somptueux rouges, particulièrement sous forme de taches de sang.
Subtil mélange de vampirisme et de saphisme, "Les Lèvres rouges d'Harry Kümel est l'occasion de voir Delphine Seyrig toute en beauté. Elle va bientôt atteindre 40 ans, tourner ses plus grands rôles, comme celui d'Anne-Marie Stretter, la mystérieuse et très sophistiquée héroïne d'"India Song" de Marguerite Duras et celui de Jeanne Dielman, la ménagère absolue saisie dans ses travaux quotidiens par Chantal Akerman.
Ici, en comtesse Bathory, déployant ses ailes de vampire et avide de chair fraîche, elle vaut largement les stars anglaises de la Hammer, donc aucune bien entendu ne rivalisera avec sa distinction naturelle.
Curieusement, le film d'Harry Kümel annonce les films de Paul Morrissey comme "Du sang pour Dracula" et n'est pas non plus éloigné des ambiances éthérées qu'aimait Serge Gainsbourg, qui aurait pu rêver d'intégrer Seyrig dans ses expériences genre "Initials BB".
Sans doute, le couple qui l'entoure dans le film, composé de John Karlen et Danielle Ouimet, ne correspond plus beaucoup aux critères actuels de la beauté et du charme. Heureusement, le charisme singulier de Seyrig compense ce gros moins.
Film expérimental tout autant que populaire, "Les Lèvres rouges" d'Harry Kümel réussit sa virée macabre sur la côte flamande et justifie aisément sa réputation de "film culte".
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