On avait d'abord vu une affiche blanche à l'encre noire : "John Parish -12 décembre 20h00". On s'était dit alors qu'il fallait y être. Rater le co-auteur de Dance hall at Louise Point n'était définitivement pas une solution envisageable.
Un de ces hommes à l'âme pure, comme Mick Harvey justement, passé par là quelques mois auparavant. Un anglais multi instrumentiste, simple et hors du temps, loin des modes. Et puis un travail de producteur passé sous silence pour Monsters in love, le dernier né de Dyonisos.
Le rock n'est pas mort heureusement. Et le duo de Morning Star chamboule les habitudes de première partie (virée au comptoir, récapitulatif des factures impayées) autant qu'il invite au voyage.
Venus défendre Opposite is true, Jesse et Kate hument l'air des 60' en session acoustique, revisitent le folk intemporel de Nick Drake. Une vraie bonne surprise par les temps qui courent moins vite qu'avant.
Les perles comme "Great day" font croire en des jours meilleurs et l'on se retrouve le cul coincé entre deux chaises en bois, perdus entre les sourires et la nostalgie d'une musique simple.
Parfois jouées au banjo en finger picking, en solo, en duo, à cappella, les titres de Morning Star donnent envie d'en savoir plus. Comme sur "Mambo", et sa tentative désespérée de faire participer le public.
A suivre et à poursuivre. Débrancher les guitares pour se reconnecter sur la mélodie ; une bien belle idée menée par les deux saltimbanques hippies.
Changement d'humeur et transition forcée vers la musique laconique de Raphaelson, songwriter multi instrumentiste venu de Suisse.
Seul sur scène, coincé entre deux amplis, mais le regard sûr et ténébreux, Raphaelson peine à imposer ses titres obscurs à la guitare. La technique d'auto-sampling bien maîtrisée fait évidemment penser à Joseph Arthur, tout autant que l'ambiance mélancolique qui se dégage du concert. Piano, guitares, Fender Rhodes, harmonicas..
Raphaelson assure toutes ses parties avec une aisance déconcertante, sans parvenir hélas à toucher son public. Impatience du public ? Manque de spontanéité des chansons ?
La réponse est sans doute ailleurs, le plus troublant restant la ressemblance frappante entre la voix de Raphaelson et celle du chanteur d'Overhead, groupe français berçant le rock et le jazz.
On repense à cette affiche. A John Parish.
Quarante années au moins de bons et loyaux services. John Parish qui débarque sur la scène de la Maroquinerie, simple et vrai, mais entouré de ses sbires britons.
Jean-Marc Butty aux drums, Marta Collica aux claviers et vocaux, et enfin la sublime tigresse Giorgia Poli à la basse. Une escouade de charme pour le guitariste cockney venu interpréter son recueil pop-vintage en catimini et ses titres aériens.
Les plus récents d'abord, issus de Once upon a little time, fraîchement sorti en France. De "Boxers" à "Sea defences", Parish surprend par ses parties vocales. On connaissait l'homme de l'ombre, tapis dans celle de Pj Harvey, et l'on retrouve l'anglais enfin décomplexé, prêt à en découdre avec ses cordes.
Mélancolie de "Water road", accompagné par son piano lancinant, foule qui s'imprègne de ce flegme anglais, cette douceur triste. Sursaut d'émotion sur "Somebody else", excellemment soutenue par ses muses Marta et Giorgia.
On le supposait affable, peu disert, inapte au propos. Et Parish s'écarte des préjugés, illumine comme on le suppose par son jeu de guitare.
Et rentre dans la danse le John Parish, qui saisit un hygiaphone noisy pour entamer "Kansas city electrician", comme au temps du rock 50' . Retour au premier album, How animals move, pour un "Westward airways", plus aérien que l'hélium, plus lourd qu'un sein qui tombe.
Un concert qui se finit est toujours un adieu amer, les applaudissements trop courts. Et pourtant, contempler Parish by night reste un plaisir solitaire.
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