Réalisé par Vittorio de Sica. Italie/Allemagne. Drame. 1h34 (Sortie 22 juillet 2020 - 1ère sortie 1970). Avec Dominique Sanda, Lino Capolicchio, Helmut Berger, Fabio Testi Romolo Valli, Camillo Cesarei, Inna Alexeievna et Katina Morisani. Avant "La Vie est belle" de Roberto Begnini, dans sa première partie, celle qui décrit la "vie rêvée" des Juifs italiens s'illusionnant sur Mussolini, longtemps vanté comme leur protecteur, pas beaucoup de films italiens avait traité l'évolution du régime fasciste devenant de plus en plus antisémite à mesure qu'il déclinait et devait "obéir" à l'Allemagne nazie.
En adaptant, sans forcément lui être très fidèle, "Le Jardin des Finzi Contini", le roman de Giorgio Bassano, Vittorio de Sica est donc quasiment le premier à aborder le virage mussolinien qui conduit le Duce à participer à la politique raciale d'Hitler.
A l'inverse de Begnini, qui racontait l'histoire d'un petit coiffeur, comme Charlot dans le "Dictateur", De Sica situe son film à Ferrare dans la très haute bourgeoisie juive, dans une famille quasiment aristocratique qui vit déjà assez naturellement en vase-clos.
Les mesures vexatoires prises par le régime qui fuit en avant, comme l'interdiction pour les Finzi Contini d'appartenir au tennis-club de Ferrare, ne les touchent pas vraiment puisqu'ils organisent pour eux et leurs amis des tournois à l'intérieur de leur immense propriété. Pareillement, quand ils ne peuvent plus étudier, ils se contentent de leur propre bibliothèque, plus fournie que son homologue universitaire.
C'est donc dans un monde ouaté que les Finzi Contini vivent dans le déni, surtout la jeune génération, Micol (Dominique Sanda), belle et intelligente, et Alberto (Helmut Berger), son frère souffreteux.
On est à la fois quelque part parmi "les jeunes filles en fleur" de Proust et un univers confiné proche des "Enfants terribles" de Cocteau, alors qu'à l'extérieur le tonnerre gronde, que le danger se rapproche sans qu'on est l'impression qu'ils le perçoivent.
Pire encore, on peut aussi penser qu'ils le perçoivent et qu'ils sont totalement tétanisés comme s'ils ne pouvaient pas quitter leur royaume où ils ont l'illusion d'être protégés. Sans doute, même, préfèrent-ils être contraints par la violence aveugle d'y renoncer, que de s'enfuir préventivement. De toute façon, en partir c'est mourir.
"Le Jardin des Finzi Contini" de Vittorio de Sica est un classique un peu fragile, qui hésite entre le réalisme et l'esthétisme. On imagine ce qu'aurait pu en faire un Visconti.
Mais le film est à l'image des œuvres de la dernière partie de la vie de De Sica. Il filme une histoire, s'attache surtout aux personnages et ne parvient pas à retrouver la grâce chrétienne qui faisait la force de son cinéma néo-réaliste.
La musique composée par son fils, Manuel de Sica, reflète assez le côté compassionnel du film. Mais, peut-être ce que réussit le mieux à restituer "Le Jardin des Finzi Contini" de Vittorio de Sica, c'est le charme suranné d'une époque en déliquescence.
Une grande mélancolie parcourt cette œuvre qui cherche jusqu'au bout à combattre sa noirceur finale.
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