Vous le savez, les livres de poche ont plein de qualités. Tout d’abord, ce sont des ouvrages qui prennent beaucoup moins de place dans les bibliothèques, ce qui est loin d’être négligeable lorsque l’on possède de nombreux ouvrages dont on n’est pas capable de se séparer. Ils ont aussi l’avantage d’être beaucoup moins coûteux que les ouvrages grand format, la lecture pouvant au final devenir un coût mensuel important. Ils permettent aussi de rattraper des lectures manquées, des ouvrages ayant reçu des critiques positives qu’on n’a pas pu lire, débordé par la lecture d’autres ouvrages (ce qui est mon cas ici). Ils ont l’avantage enfin de redonner une nouvelle vie à des ouvrages sortis souvent un an avant en grand format.
Alors voilà, j’avais repéré ses deux ouvrages dès leur sortie chez Albin Michel l’année dernière. Je savais qu’un jour ou l’autre je lirai l’ouvrage de Victoria Mas, Le bal des folles et celui de Tommy Orange, Ici n’est plus ici. J’ai donc attendu la sortie en poche de ses deux ouvrages pour me lancer dans la lecture de celui qui a reçu le prix Renaudot des lycéens (Le bal des folles) et de celui qui fit partie de la sélection 2021 du Livre de Poche (Ici n’est plus ici) et qui a été qualifié de meilleur roman de l’année par la presse américaine.
Les deux ouvrages sont de formidables romans. Il nous raconte deux moments d’Histoire différents, l’un en France et l’autre aux Etats-Unis. L’ouvrage de Victoria Mas se déroule en 1885. Comme chaque année, à la Salpêtrière se tient le très mondain "bal des folles". C’est une soirée où le tout Paris s’encanaille sur des airs de valse et de polka en compagnie de femmes déguisées en colombines, gitanes, zouaves et autres personnages. Cette scène joyeuse cache en fait une réalité bien sordide. Ce bal "costumé et dansant" est une des dernières expérimentations de Charcot, adepte de l’exposition des fous.
Dans Ici n’est plus ici, l’histoire se déroule à Oakland, dans la baie de San Francisco où les Indiens ne vivent pas sur une réserve mais dans un univers façonné par la rue et la pauvreté, où chacun porte les traces d’une histoire douloureuse. Pourtant, les membres de cette communauté disparate tiennent à célébrer la beauté d’une culture que l’Amérique a bien failli engloutir. A l’occasion d’un grand pow-wow, douze personnages, hommes et femmes, jeunes et moins jeunes, voient leurs destins se lier. Ensemble, ils vont faire l’expérience de la violence et de la destruction, comme leurs ancêtres tant de fois avant eux.
D’un côté, nous suivons donc le destin de femmes victimes d’une société masculine qui leur interdit toute déviance et les emprisonne. De l’autre, nous suivons le destin douloureux des Amérindiens au travers d’un roman choral puissant porté par une écriture lumineuse qui nous montre comment il est difficile de naître indien aux Etats-Unis.
Chez Victoria Mas, l’ouvrage est un véritable hymne à la liberté pour toutes les femmes que le 19ème siècle a essayé de contraindre au silence. C’est un ouvrage prenant et émouvant qui nous parle de la condition des femmes à la fin du 19ème siècle.
On en apprend beaucoup sur la culture amérindienne chez Tommy Orange, beaucoup sur la neurologie chez Victoria Mas. Les deux livres ont le point commun d’être un premier roman, totalement réussi pour l’un comme pour l’autre. Deux ouvrages que je vous invite à lire puisque nous avons la chance de pouvoir les lire en poche. Alors n’hésitez pas. |