La peinture des pays nordiques revient en force au premier plan muséal avec, et entre autres, les monstrations dédiées à "Anders Zorn - Le maître de la peinture suédoise" et "L’Age d’or de la peinture danoise (1801-1864)" au Petit Palais respectivement en 2017 et en 2020, et à "Hammershøi - Le maître de la peinture danoise" au Musée Jacquemart-André en 2019.
Le Musée Marmottan Monet continue cette exploration avec "L'heure bleue de Peder Severin Krøyer", une exposition monographique dédiée au peintre danois Peder Severin Krøyer (1851-1909) organisée avec le Skagen Kunstmuseer au Danemark sous le haut patronage de la Reine Margrethe II.
Nonobstant son intitulé et la sélection opérée par la commissaires - Marianne Mathieu, directrice scientifique du musée Marmottan Monet, Dominique Lobstein, historien de l’art, et Mette Harbo Lehmann, conservatrice au Skagen Kunstmuseer - la monstration ne se limite pas aux toiles déclinant le motif de l'heure bleue, au demeurant commun aux peintres de l'Europe du Nord, qui se réfère au phénomène lumineux observé plus spécifiquement lors du crépuscule nordique
En effet, déclinée selon un parcours thématique à la scénographie pétulante de Anne Gratadour, elle comporte une soixantaine de toiles réalisées par Krøyer lors de son séjour au sein de la privilégiée colonie d'artistes de Skagen sise à l'extrémité du Jutland aux confins de la mer du Nord et de la mer Baltique où se produit ce phénomène, qui dresse un panorama de son éclectisme pictural tant en mantière de genres que de manières.
La villégiature heureuse d'un gentleman-painter
L'exposition est introduite par un étonnant et anachronique portrait en pied du peintre.
En effet, arborant une élégante tenue blanche, il est représenté, par son homologue compatriote Laurits Tuxen, sur une plage, campé dans une attitude et un équipement, un pic de parasol et une boite à peinture qui évoquent davantage le fusil et la bourriche à gibier d'un chasseur d'opérette.
Certes, il goûte vraiment les joies cynégétiques et est imbu de sa situation sociale bourgeoise.
Mais, formé à l’Académie des Beaux-arts de Copenhague et à l’atelier de Léon Bonnat à Paris, il ne peut être qualifié de peintre du dimanche au regard de sa production prolifique et de sa quête de reconnaissance officielle.
Et il a connu une belle notoriété de son temps avant d'être éclipsé, bien que n'oeuvrant pas dans le même registre, par son cadet et élève Vilhelm Hammershoï et plongé dans un long purgatoire même au plan national.
Ainsi navigue-t-il du portrait, notamment l'autoportrait et celui de sa très belle et jeune épouse mais également ceux à destination commerciale, au paysage en passant par les scènes de genre ("Femmes au jardin").
Inscrit dans le naturalisme, il produit des tableaux de grand format pour les salons sur la thématique de la pêche.
Tels "Pêcheurs de Skagen" - "Bateaux de pêche" - "Départ des bateaux de pêche après le coucher du soleil" qui reçu la médaille d'honneur à l’Exposition Universelle de 1889.
Il use d'un pseudo-impressionnisme pour les scènes intimistes ("Hip, hip, hip, hourra ! Déjeuner d’artistes") et de plein air et s'inspire de la manière vitaliste pour les jeux balnéaires ("Garçons se baignant un soir d'été") et d'une pointe de symbolisme avec les traces de pas sur le sable ("Plage au sud de Skagen").
Indice récurrent qui se retrouve que les fameuses toiles de l'heure bleue "Soirée calme sur la plage de Skagen" et "Depuis la plage sud, Skagen".
A repérer également les cadrages inhabituels avec des personnages tronqués ou à la limite du hors champ ("Artistes sur la plage de Skagen"- "Marie Krøyer peignant sur la plage").
A voir en complément ou en introduction à la visite le film "L’heure bleue de Peder Severin Krøyer" réalisé par Ane Skat |