Spectacle de théâtre musical conçu et mis en scène par Serge Hureau et Olivier Hussenet, avec Loïc Renard et Serge Hureau accompagnés par les musiciens Clément Caratini, Lionel Privat et Richard Dubelski. Cela fait vingt ans que Charles Trenet est parti rejoindre Charles Cros et sa chère maman. Si certains ont continué à l'écouter et à le chantonner, bien d'autres ont accepté qu'il n'ait été qu'un chanteur de "son" époque. Fermement à la barre du Hall de la Chanson, Serge Hureau et Olivier Hussenet ont mis leur veto à ce lent oubli. Voilà donc Charles Trenet de retour... Et naturellement, le spectacle commence avec "Le Revenant", une chanson des années 1970 pas forcément connue du "Fou Chantant", où les souvenirs lui font faux bond car dit-il, "je ne suis qu'un vagabond". Un vagabond prêt à chanter sous la forme d'un jeune homme (Loïc Renard) ou d'un vieux jeune homme (Serge Hureau). Et s'il se lance par "Je chante", un "Je chante" plus scandé que chanté, c'est pour bien signifier qu'il n'est pas revenu pour aligner ses tubes. S'il y aura bien "Le jardin extraordinaire", pas question de "La Mer", de "Que reste-t-il de nos amours ?", de "Y a d'la joie" ou de "Douce France". On n'y perdra pas au change car les fins connaisseurs auront de belles versions de chansons qu'ils aiment, comme le merveilleux "abbé à l'harmonium" qui permet à Serge Hureau de tirer à la fois, et presque simultanément, des rires et des pleurs de son auditoire, et aux autres de découvrir toute la palette du chanteur narbonnais. De l'époque du duo "Charles et Johnny" ("Le fils de la femme poisson") à celle de la maturité nostalgique ("Fidèle"), c'est une carrière de plus de cinquante ans que l'on traverse dans un savant désordre et grâce à un dispositif hilarant qui rappelle que Trenet était un ami de Cocteau et pas si loin des surréalistes. Ne cherchant pas à copier les versions originales, ne cherchant pas non plus à les moderniser à tout prix, Serge Hureau réussit le miracle de réenchanter Trenet sans le trahir. Grâce à une diction impeccable, une manière subtile de raconter chaque chanson comme une histoire, il sert parfaitement l'auteur de la "Folle complainte". On découvrira grâce à des musiciens tous terrains (Clément Caratini à l'orgue électrique et pas que, Lionel Privat à la guitare et pas que, Richard Dubelski à la batterie et pas que), toujours prêts à participer aux élucubrations imaginées par Hureau et Hussenet, que Trenet était aussi un excellent compositeur influencé à la fois par Cole Porter et par Kurt Weil. En une bonne quinzaine de chansons, Loïc Renard et Serge Hureau", dans "Trenet, le revenant" donne à entendre un tout petit échantillon d'une œuvre immense. Il faudrait au moins cinquante spectacles différents pour faire le tour (et encore) de toute la discographie de Charles Trenet. Pour l'heure, on se contentera de ce "pilote" qui rouvre avec bonheur les portes de l'univers génial du premier poète chantant.
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