Comédie de Arthur Jugnot et Flavie Péan, mise en scène par Artur Jugnot, avec Davy Sardou, Lancelot Cherer, Flavie Péan, Pierre Bénézit, Laurence Porteil et Antoine Lelandais.
D’Antoine de Saint-Exupéry on connait principalement son œuvre littéraire - "Vol de nuit", "Terre des hommes", et bien sûr, "Le Petit Prince" - et des bribes de son histoire personnelle, sa passion pour l’aviation, son enrôlement dans la guerre et sa mystérieuse disparition. Mais saviez-vous qu’il avait étudié les beaux-arts, été commercial pour une entreprise vendant des camions, qu’il vécut une passion dévastatrice avec une artiste peintre salvadorienne qu’il épousa et avec qui il restera marié jusqu’à sa mort, ou que le célèbre mouton du petit prince lui a été inspiré par le chien d’une de ses maîtresses ? Dans "Saint-Exupéry, le mystère de l'aviateur", Arthur Jugnot et Flavie Péan, les auteurs, se sont attachés à lever le voile, de manière ludique et drolatique, sur de nombreux pans méconnus de la vie de cet homme, qu’on découvre au fil de tableaux encore plus extraordinaires que sa notoriété ne le laisse entendre. S’émancipant volontairement du format classique du biopic, ils ancrent leur récit dans le présent, via une suite d’échanges conflictuels entre un père et son fils à la relation houleuse, faute à un lourd passif, et qui se retrouvent pour vider ensemble l’appartement du grand-père qui vient juste de décéder. Ce dernier, obsédé par la vie et l’œuvre de l’aviateur, a collectionné frénétiquement une multitude d’objets en rapport avec son héros. Au fil des découvertes faites par les protagonistes, le rideau du présent se déchire pour faire revivre les temps forts de la vie du célèbre auteur et aviateur. Le spectateur se laisse ainsi transporter successivement entre les scènes de la vie de Saint-Exupéry et la relation filiale compliquée de nos deux narrateurs, avec de-ci de-là quelques petits sketchs qui apportent peu au récit mais permettent de détendre l’atmosphère, tel un numéro de mariachi, une partie de belotte entre Marilyn et Elvis ou encore un duo passionné de tango. Les bons mots fusent tout comme les citations de l’auteur vedette, avec toujours ce mélange d’authenticité historique et une volonté assumée de proposer un joyeux divertissement. La mise en scène d’Arthur Jugnot est dynamique, ne laissant volontairement que très peu de temps mort, ce qui est un exploit quand on considère les nombreux changements de rôles et de costumes (de Bérengère Roland) des comédiens qui interprètent, à six seulement, au moins une vingtaine de personnages.
Davy Sardou et Pierre Bénézit offrent tous les deux de belles interprétations, l’un en Antoine de Saint-Exupéry alliant parfaitement détermination et sensibilité, l’autre en père aimant mais dépassé par la colère de son fils, joué par Lancelot Cherer. La gouaille d’Antoine Lelandais, l'énergie de Flavie Péan tout comme la force du jeu de Laurence Porteil portent l’ensemble des personnages qu’ils incarnent chacun avec beaucoup d’énergie. Les décors de Juliette Azzopardi et Jean-Benoît Thibaud sont à l’image du spectacle, ludiques et imaginatifs, et permettent de transposer aisément le récit dans les différents lieux et époques via un ingénieux système de panneaux coulissants représentant un appartement bourgeois sur lesquels peuvent se projeter des vidéos (imaginées par Sébastien Mizermont) le transformant en rue, nuit étoilée… "Saint-Exupéry, le mystère de l'aviateur" assume donc son caractère divertissant tout en proposant une plongée intéressante dans la vie d’un homme qui gagne à être connue. |