Monologue dramatique de Céline Barcaroli interprété par Emma Barcaroli dans une mise en scène de Grégory Cauvin.
Plus d'un demi-siècle après sa mort tragique et prématurée, la figure de Marilyn Monroe, érigée en icone mondiale, demeure présente dans la mémoire collective et alimente les imaginaires multples, du biopic romancé à la fiction inspirée en passant par l'immersion dans le moi intime.
La proposition de Céline Barcaroli intitulée "Marilyn Inside" s'inscrit clairement dans ce dernier registre en élaborant, flirtant avec le biopic, en forme de conversation avec un interlocuteur anonyme et muet qui se concrétise en seul en scène en adresse au public qui synthétise parfaitement la symptomatologie de l'intéressée.
Pour sa partition monologale, Céline Barcoli se réfère à l'analyse qui prévaut quant à une personnalité potentiellement schizophrénique résultant d'un empilement identitaire entre, d'une part, le moi réel et le moi fantasmé de Norma Jean Baker, fille sans père d'une mère "flapper" atteinte de troubles psychiatriques, et élevée par une famille d'accueil rigoriste, dont l'enfance contient tous les marqueurs d'un besoin d'amour, de protection, d'amour et de reconnaissance jamais satisfait. Et, d'autre part, le sex symbol Marilyn créé par les Studios Fox en pleine guerre des majors à l'âge d'or d'Hollywood, en pulpeuse et ravissante idiote reprenant le flambeau éteint de la blonde platine pour damer le pion à la bombe sexuelle traditionnellement brune, devenu un personnage à la dévorante puissance invasive.
A cela s'ajoute l'obsession d'une inatteignable perfection pour incarner les personnages fictionnels de cinéma, l'aspiration à un amour quasi mystique pour celle devenue un objet sexuel et la quête inaccessible de l'instant de vérité.
L'opus est mis en scène dans une sobriété adéquate par Grégory Cauvin et une superbe scénographie de Michel Braun et Sandrine Lamblin avec un astucieux décor de loge d'artiste en panneaux de miroir recelant des étagères mobiles faisant office de bar et d'albums photo, soutenue par une belle création lumières en clair-obscur de Sébastien Prud'homme.
Au jeu, et sans verser dans une incarnation mimétique, Emma Barcaroli transcende la femme qui veut (dé)livrer son "paysage intérieur" et parvient, dans ce difficile registre du flux de pensé, à incarner, de manière aussi émérite que maîtrisée, la douleur profonde d'une âme. |