Targala, la maison qui n'en est pas une
(Johnkôôl Records) mars 2022
"C'est comme dans la vie : j'aime plonger dans le vide et devoir inventer quelque chose." Emmanuelle Parrenin
Emmanuelle Parrenin est insaisissable. Bricoleuse, artisane de la musique, elle aura vécu mille vies. Un peu enfant sauvage, sorcière art-thérapiste, collecteuse de sons et de chansons traditionnelles, danseuse, infatigable voyageuse, chanteuse, musicienne jouant de la vielle à roue, des harpes, de l’épinette des Vosges, du dulcimer... Artiste culte et fondamentale de la scène folk française des années 70, esthétique dont elle ne cessera de repousser ou redéfinir les contours, mais véhiculant également un peu tous les clichés du genre.
Sa discographie comporte une grosse dizaine de disques sous son nom ou en groupe, La Maumariée (1971 chez Sonopress), Le galant noyé (1971), Mélusine (1973 chez Le Chant du Monde), Château dans les nuages (1976, Sonopress), Gentiane (1976, CBS-Ballon noir), Pérélandra (2017, Le Souffle Continu), Jours de grève (2021, Versatile Records)... Peut-être avez-vous déjà visité Maison rose (1977, CBS-Ballon noir) ou Maison Cube (2010, Les Disques Bien) dont ce Targala pourrait être la suite.
Il y a quelque chose d’intemporel dans la musique d’Emmanuelle Parrenin (comme dans sa voix qui semble ne pas prendre d’âge) et ce Targala est à la fois très ancré, avec son traitement sonore, ses tics musicaux, cette façon de chanter, dans les années 70 et dans quelque chose de plus moderne. Aussi parce que dans ce disque elle collabore avec Colin Johnco, Etienne Jaumet (avec qui elle déjà enregistré un disque) et Cosmic Neman (Zombie Zombie), Paulie Jan, Gaspar Claus, Quentin Rollet...
Comme à son habitude, Emmanuelle Parrenin effectue une sorte de saut dans le vide, où au folk, aux musiques traditionnelles d’ici et d’ailleurs (n’entendons-nous pas des réminiscences de musiques indiennes, de gamelan ?) se mêlent musiques électroniques, des expérimentations sonores, une manière de façonner cette même matière sonore.
Emmanuelle Parrenin joue avec de petits intervalles, des dissonances, le souffle, les chuintements, les grincements, les répétitions pour renforcer un côté très étrange, où les basses peuvent servir de fondation, les mélodies de lignes d’apaisement. Un travail sur les résonances, l’augmentation de la durée, de l’intensité des sons. Mais la résonance tient une place fondamentale dans sa vie, elle qui a guéri de sa surdité en rééduquant ses oreilles par les sons de sa voix et la résonance par conduction osseuse de ses instruments. C’est peut-être aussi pour cela que nous voyageons quasiment entre rêve et réalité dans un espace onirique et presque méditatif. Absolument poétique dans tous les cas.
# 21 avril 2024 : Des beaux disques, des beaux spectacles, une belle semaine
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