"Aile que du papier repolie
Bats toute si t’initia
Naguère à l’orage et la joie
De son piano Misia." Mallarmé
La formation de l’ensemble Revue Blanche n’a rien d’habituelle puisque constituée d’une harpe (Anouk Sturtewagen), d’une flûte traversière (Caroline Peeters), un violon alto (Lore Binon) et d’une chanteuse soprano (Kris Hellemans).
Cette combinaison offre un éventail de couleurs, de sonorités plutôt cristallines qui tendent vers l’aérien (l’absence d’instrument grave l’expliquant notamment). Son nom est tiré de la célèbre Revue Blanche, revue littéraire et artistique fondée par les frères Natanson en 1889 à Liège puis installée à Paris. "Le nom Revue Blanche vient du fait que la somme de toutes les couleurs est le blanc, symbolique de la page vierge permettant d’accueillir toutes les opinions, tous les courants". "Un centre de ralliement de toutes les divergences" comme le disait André Gide. Rien de surprenant donc que l’ensemble propose dans ce disque un programme autour de "la gentille Misia".
Marie Sophie Olga Zénaïde Godebska, plus couramment appelée Misia, est née le 30 mars 1872 à Saint-Pétersbourg. Elle est la fille aînée d’Adrien-François Servais, grand violoncelliste virtuose et de Sophie Féguine. Elle est élevée par sa grand-mère maternelle dans une maison où l'activité musicale reste intense malgré la mort quelques années plus tôt d'Adrien-François Servais. Elle y fera la connaissance de Franz Liszt, un familier, y apprendra le piano. Elle aura quelques années plus tard Gabriel Fauré comme professeur. Elle épouse en 1893 Thadée Natanson.
Elle est muse, égérie, mécène, musicienne, professeur, au centre de la Revue Blanche et d’une galaxie d’artistes (Henri de Toulouse-Lautrec, Bonnard et Vallotton laissèrent une série de magnifiques portraits d’elle, Alfred Jarry, Stéphane Mallarmé, Claude Debussy, Tristan Bernard...).
En 1902, Misia quitta Thadée ruiné pour épouser le patron de presse Alfred Edwards. Mondaine. Elle devient "reine de Paris". En troisièmes noces, elle épouse le peintre espagnol José Maria Sert et soutien des artistes comme Diaghilev, Stravinsky, Ravel, Auric, Poulenc, Milhaud, Radiguet, et puis Coco Chanel.
Misia meurt le 15 octobre 1950. Coco Chanel habilla la défunte tout de blanc avec une écharpe rose reposant parmi des fleurs blanches, la rendant aussi belle que dans sa jeunesse.
L’ensemble nous invite à nous replonger dans cette époque avec des œuvres de Déodat de Séverac ("Temps de neige", "Un Rêve", "Les Hiboux", "L'infidèle"), Satie (Trois Morceaux en forme de poire : "Manière de commencement", "En plus", "Daphénéo", Satie amant de Misia et qui lui dédia trois compositions en forme de poire), Durey (Six Madrigaux de Mallarmé), Ravel (Sonatine), Auric (Six poèmes de Paul Éluard), Casella (Dans une salutation suprême) et Duparc (Extase). Le tout interprété avec beaucoup de raffinement et de subtilité.
Tout fout le camp en ce moment. En attendant des jours meilleurs, accrochons nous et noyons notre chagrin dans la culture !Cc'est parti pour le sommaire de la semaine en commençant par le replay de la 63eme Mare Aux Grenouilles.