Réalisé par Chie Hayakawa. Japon. Drame. 1h50 (Sortie 7 septembre 2022). Avec Chieko Baisho, Hayato Isomura, Stefanie Arianne, Taka Takao et Yuumi Kawai.

"Plan 75" est le premier long métrage de Chie Hayakawa. Il reprend l'argument de son court-métrage portant le même nom, qui constituait une partie de l'anthologie "Ten Years Japan" produit en 2018 par Hirozaku Kore-Eda.

En visionnant "Plan 75", on comprend très vite pourquoi l'un des maîtres actuels du cinéma japonais a pu s'intéresser au récit émouvant conté sur un ton qui évite les effets faciles sur la fin de vie d'une vieille dame très digne.

Situé dans un avenir tout proche, à peine une dizaine d'années, "Plan 75" n'a rien d'un film de science-fiction, à peine pourrait-on dire également qu'il anticipe le futur. Dans cette histoire à peine fictionnée, on a vraiment l'impression d'être dans un documentaire qui décrit par l'exemple de Michi (Chieko Baisho) comment sont traitées les vieilles personnes sans ressources dans le Japon post-Fukushima.

Et ce sera pour tous les spectateurs qui en sont restés aux films d'Ozu et de Mizogushi une surprise totale : terminée la tradition japonaise d'abriter ses parents quoi qu'il en coûte.

Une mégalopole comme Kyoto ou Tokyo est remplie de personnes âgées misérables, contraintes à la mendicité ou aux petits boulots. Alors dans son "infinie générosité" - ou si l'on préfère dans son cynisme total, l'Etat nippon a décidé de mettre en place un programme d'euthanasie "soft". Les vieux nécessiteux, en général des veuves, sont accompagnées vers leur fin de vie, en échange d'un adoucissement de leur condition précaire.

Racontée ainsi, le film pourrait être sinistre ou préfigurer un remake de "Soleil Vert". La délicatesse minimaliste de Chie Hayakawa préserve du morbide. On ne peut pas dire qu'on va franchement s'amuser, mais la qualité des comédiens, la belle écriture des personnages et notamment la belle connivence pudique entre la vieille dame japonaise et son "infirmière".

Au-dessus de tout, il y a l'interprétation de Chieko Baisho. On suppose que les Japonais sont peinés de son sort ou s'identifient à elle, car c'est quelqu'un qui les accompagne depuis plus de cinquante ans.

En effet, elle joue la sœur de Tore-San dans la cinquantaine de films qui constitue la plus vieille et la plus longue série cinématographique jamais tournée dans le monde. Très populaire, elle donne à son rôle presque silencieux une espèce de sérénité grave qui attire la compassion et jamais de larmes mélodramatiques.

" Plan 75" de Chie Hayawaka est un premier film prometteur et le rôle d'une vie pour une actrice près de son terme.