En collaboration avec le Museo Frida Kahlo, le Palais Galliera, musée de la mode de la Ville de Paris, consacre une exposition à Frida Kahlo (1907-1954) non sous l'angle de la production artistique de la peintre mexicaine devenue iconique mais sous celui de la femme.
Intitulée "Frida Khalo - Au-delà des apparences", elle a été conçue comme une évocation sous l'angle de l'intime afin de découvrir la construction de son identité à travers sa manière de se présenter et de se représenter notamment dans le cadre du mouvement de la "mexicanidad".
Ainsi les commissaires Circe Henestrosa, directrice de l’école de mode Lasalle à Singapour, Galliera Gannit Ankori, directrice du Rose Art Museum aux Etats-Unis, et Miren Arzalluz, directrice du Palais Galliera, ont sélectionné un conséquent corpus documentaire issu de ses effets personnels.
Frida Khalo "la coja au ruban autour d'une bombe"*
Les commissaires précisent leur intention d'éclairer le parcours et l'oeuvre de Frida Khalo tant dans l'art que la politique de son pays qui l'a érigée en icône en situant leur proposition à la croisée de l'Histoire de l'art et de la mode, une approche développée par les deux premières commissaires dans les expositions au Victoria & Albert Museum à Londres en 2018 et en 2019 au Brooklyn Museum à New York.
Paradoxalement, la monstration présentée dans le cadre de la vocation de musée de la mode du Palais Galliera est introduite par une affiche reproduisant une photographie de Toni Frissell pour une édition du magazine Vogue en 1937 représentant Frida Khalo dans une tenue sobre bien différente de son vestiaire et dans l'attitude d'une figure révolutionnaire tenant l'étendard de la révolte sur les barricades, évoquant, et entre autres, celle de la principale protagoniste de "La Liberté guidant le peuple" de Delacroix ou de "La Marseillaise" de Rude.
Cela étant, elle se déploie en trois actes qui correspondent à la synthèse opérée par les commissaires à partir de la signification symbolique du vêtement définissant "les frontières entre biographie, autoportrait et expression vestimentaire" et, en l'espèce, l'affirmation de soi dans une singularité unique liée à l'identité ethnique, à la "mexicanidad", et à son handicap.
L'Acte I, dans la Galerie courbe en rez-de-jardin, relate la biographie détaillée de Frida Khalo depuis son arbre généalogique et son point d'ancrage que fut sa maison natale la Casa Azul dans laquelle se trouve de nombreux pièces relatives la culture pré-hispanique et à l'art populaire telles les peintures votives.
Egalement avec son parcours médical et ses accidents de santé, les séquelles d'une poliomyélite infantile et un accident de bus qui la laisse handicapée et douloureuse à vie l'obligeant au port d'un corset orthopédique puis à une amputation de la jambe qui ouvrent l'Acte II avec les corsets en plâtre dont certains peints et décorés par ses soins, et l'un avec le symbole graphique du communisme idéologie à laquelle elle avait adhéré, les bottines strassées et la jambe prothétique customisées.
La Galerie Sud accueille des tenues traditionnelles de la région de Tehuantepec, foyer d'origine de sa famille maternelle, dont Frida Khalo retient les tropismes liés à son ethnicité affirmée, outre la chromatique chatoyante, la profusion de broderies et les motifs floraux, l'ampleur et la longueur de la jupe ainsi que des accessoires comme le châle et la chasuble, qui permettent tant de dissimuler les parties abîmées de son corps que de forger son image.
Sa garde-robe mise en regard de beaux portraits photographiques de Nikolas Murray est complétée par des bijoux et parures et d'objets émouvants comme son petit nécessaire à couture.
Des tenues qui se retrouvent souvent sur ses toiles notamment ses autoportraits telle la tenue avec la coiffe-cape de cérémonie en dentelle inspirée de la couronne rayonnante de la Vierge.
L'Acte III se déroule dans le Salon d'honneur au rez-de-chaussée du Palais Galliera avec une "exposition-capsule" qui illustre l'influence de la garde-robe de cette personnalité hors norme comme source d'inspiration de la mode contemporaine, de la Haute Couture aux créateurs et designers avec en tête de gondole, et en clin d'oeil, un modèle de 1998 de Jean-Paul Gaultier qui promeut le corset sous-vêtement baleiné en sexy habit couture.
De Franck Sorbier qui rend un hommage explicite à Frida Khalo avec notamment un poncho à franges orné de son portrait
àt Alexander McQueen usant de la variation du corset pour Givenchy, ou celui étonnant de Yoji Yamamoto décline en contreplaqué sur kimono, la fine fleur de la mode est au rendez-vous.
De la Haute Couture, avec les virginales en bouillonné d'organza de Kei Ninomiya et Valentino qui voisinent avec la revisite minimalisme de Kris Van Assche
à la sublimation par Riccardo Tisci pour Givenchy au romantisme pour princesse moderne du designer Erdem Moralioglu
et le monochromatisme de Comme des garçons rivalise avec le clinquant de Richard Quinn.
A noter un parcours de visite numérique numérique disponible sur l’application du Palais Galliera. et, en préambule à la visite :
à voir en vidéo :
l’exposition immersive "Viva Frida Kahlo" au Viage Digital Art Theatre à Bruxelles en 2022
l'exposition "Frida Kahlo - Making Her Self Up" au Victoria & Albert Museum à Londres en 2018
l'exposition "Frida Kahlo: Appearances Can Be Deceiving" au Brooklyn Museum à New York en 2019
le documentaire "Frida Khalo - Portrait d'une artiste"
la visite virtuelle de la Casa Azul
et en podcast "Des ailes de mouette noire : portrait en miroir de Frida Kahlo"
création radiophonique sur France Culture dans le cadre de l'émission "Fictions / Le Feuilleton" |