Réalisé par Marie-Claude Treilhou. France. Drame. 1h38 (Sortie version restaurée 30 novembre 2022 - 1ère sortie 2002). Avec Ingrid Bourgoin, Dominique Cabrera, Claire Simon, Marie-Claude Treilhou, Alain Guiraudie et André Van In.
Belle occasion que la restauration de ce film de Marie-Claude Treilhou pour faire ressurgir une certaine tendance du cinéma français incarnée, entre autre, par cette réalisatrice qui s'est illustrée à la fois dans le documentaire et la fiction depuis 1980, date de la sortie de son "Simone Barbès ou la vertu".
Ce premier long métrage avait marqué les esprits et avait été rangé aux côtés des films de Paul Vecchiali, Jean-Claude Guiguet et Jean-Claude Biette comme appartenant à un cinéma de cinéphiles rompant avec les fondamentaux de la dite "Nouvelle Vague".
On y revendiquait une écriture, un jeu, des décors, qui pouvaient avoir leurs origines dans le cinéma dit de "qualité française", l'ennemi juré des Truffaut-Godard. On n'avait rien contre les histoires très écrites, contre un recours à une dose romanesque de rêve et d'irréalité.
On y aimait la sophistication, l'élégance et de beaux dialogues pouvant même réhabiliter les bons mots à la Prévert. Bientôt viendront s'y adjoindre d'autres cinéastes, comme Jacques Davila ou Gérard Frot-Coutaz, hélas trop rapidement disparus à l'ère du Sida.
"Un petit cas de conscience" est le dernier film de fiction de Marie-Claude Treilhou, qu'elle réalise en compagnie d'Ingrid Bourgoin, qui jouait Simone Barbès, dans le film éponyme. Ici, d'ailleurs, elle se prénomme aussi Simone...
On vit dans un tout petit monde dans les films de Marie-Claude Treilhou et celle-ci l'affirme clairement en ayant réuni pour ce suspense autant bavard que campagnard toute une bande de réalisateurs et de réalisatrices... A commencer par elle-même et ses amies, Dominique Cabrera et Claire Simon, et en y ajoutant le documentariste André Van In et le tout jeune Alain Guiraudie, encore en train de réaliser des courts et des moyens métrages dans son Sud-Ouest.
Pour débaucher ses ami(e)s, le prétexte trouvé par Marie-Claude est bien mince : un vol, qu'on n'ose appeler un cambriolage, dans la maison de campagne de l'une d'entre elles. Qui est le coupable ? Vaut-il mieux chercher ou ne pas chercher ? Si l'on élargit les recherches, ne va-t-on pas froisser des susceptibilités, réveiller de vieilles querelles, surtout que le vol est piteux.
Comme on en est encore à des années-lumière du vote sécuritaire parmi les personnes disposant d'une minuscule résidence secondaire, est-il même possible d'évoquer la piste la plus logique et de s'en prendre à un certain brocanteur-chiffonnier du coin.
Attention ! Dans ce cinéma où prime la gentillesse, il n'est pas bon d'accuser sans preuve...
Et puis toutes ces dames du documentaire, elles aiment bien les petites enquêtes, les interviews où l'on recoupe des faits qui feront office d'hypothèses , et l'on peut compter sur elles pour y aller de leurs supputations afin qu'elles finissent bout à bout par faire un objet filmique..
"Un petit cas de conscience" de Marie-Claude Treilhou est un film qu'on ne pouvait faire qu'en France. Son existence ne relève d'aucun miracle. Elle clôt une période commencée dans les années 1970, pendant laquelle des œuvres sensibles et fragiles comme celle-ci ont pu s'exposer à un petit public à contre-courant à la fois du cinéma populaire à la Belmondo-Delon et du cinéma art et essai formaté nouvelle vague.
Il ne faut donc surtout pas considérer "Un petit cas de conscience" comme un "ovni" cinématographique, mais le présenter comme le représentant tardif d'une école non dogmatique qui cherchait à exister entre ces deux catégories. Cela donne un film libre, léger et hors du temps qui mérite d'être enfin reconnu. |