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puce Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême #50 (édition 2023) - Maybelline Skvortzoff
Interview  (Angoulême)  26 au 29 janvier 2023

On trouve des choses étonnantes au catalogue des éditions Tanibis, comme les albums de l’argentin Lucas Varela ou les délires graphico-pshychédéliques de Jesse Jacobs.

Cette année, le jury du FIBD avait retenu dans sa sélection officielle Roxane vend ses culottes, un premier album à la fois drôle, énergique et sincère.

Comme son titre permet de le deviner, on y suit une jeune fêtarde qui essaie de joindre les deux bouts en faisant commerce de ses sous-vêtements sur internet.

J’ai rencontré Maybelline, l’autrice, à l’occasion du festival.

Que peux-tu nous dire de la genèse de cet album ?

Maybelline Skvortzoff : C’est une histoire assez longue et chaotique. Je dessine de la BD depuis que je suis petite. J’ai fait des études de BD à Bruxelles où j’ai plus passé mon temps à prendre du speed qu’à concrètement dessiner, et je suis finalement revenue à Paris pour travailler dans une librairie de bandes dessinées.

J’ai bossé au milieu de centaines de BD tout en voyant mes potes d’école sortir les leurs et c’était hyper angoissant pour moi parce que je n’arrivais pas à m’y mettre. Finalement, j’ai largué la librairie, et comme je pense que l’on va toujours puiser dans ses expériences, j’ai eu besoin de raconter une histoire de ce personnage-là qui me ressemble beaucoup, qui est un peu perdue, qui est constamment en recherche de sensations fortes et qui se laisse constamment entraîner dans des histoires absurdes et abracadabrantes.

On me demande toujours si j’ai vendu mes sous-vêtements. Il y a un mec pendant ma première dédicace qui m’a demandé s’il pouvait m’acheter ma culotte… J’ai toujours été intriguée par ce business-là et j’ai pas mal d’amies qui l’ont fait. Ce truc-là est quand même assez croustillant, je crois qu’il y a un côté un peu putassier, c’est l’occasion d’avoir un titre accrocheur ! A partir de là, j’ai tissé une petite histoire.

J’ai commencé à bosser dessus quand je suis sortie de ce délire d’autodestruction dans lequel j’étais, où je me mettais des murges pas possibles. Après, c’est parce que tout cela m’est arrivé que j’ai pu raconter cette histoire-là. Par exemple, cette histoire de poppers dans le Coca, si je ne l’avais pas fait, je n’aurais pas pu le raconter. Généralement, plutôt que d’avoir un scénario bien ficelé dès le départ, j’ai des impressions et j’ai scènes que j’ai envie de représenter, et après je fais mon bricolage avec.

Comment as-tu construit ce bricolage-là ?

Maybelline Skvortzoff : Je ne pense pas trop mes histoires en termes de situation initiale, élément déclencheur, etc. Avec un personnage comme celui-ci, le fil conducteur peut être juste le fait qu’elle soit brinqueballée et qu’il y ait une forme de gradation.

J’ai eu énormément de retours comme quoi ça finissait en queue de poisson et c’était un enchaînement de scènes sans queue ni tête... On m’a beaucoup dit que ça finissait trop vite. J’aime raconter les histoires vite, que l’on ne perde pas de temps. C’est vrai que du coup, je survole beaucoup de choses.

C’est un truc que j’ai intégré parce que mon prochain bouquin va être deux fois plus long. J’ai l’impression que j’ai évolué dans ma manière de raconter des histoires.

Tu es déjà en train de travailler à ton prochain album ?

Maybelline Skvortzoff : Oui, j’attaque directement, je commence à dessiner. J’ai tout mon scénario, un récit choral avec plein de personnages différents au sein d’une même famille et qui, du coup ont des âges différents, des tristesses différentes, se posent des questions différentes.

La forme chorale va te permettre de sauter du coq à l’âne en toute liberté.

Maybelline Skvortzoff : Parfaitement, j’aime bien cet exercice-là. Là j’étais dans la recherche de personnages, je les dessine plein de fois sous toutes les coutures pour les avoir bien en main et qu’ils se concrétisent, c’est un moment qui est vraiment passionnant. Comme ils sont divers, je leur fais plein de gueules différentes.

Il y a un peu de moi dans tous, c’est inévitable. Dans Roxane, il y a beaucoup de vécu. Pour décrire son amitié avec sa colocataire, je me suis un peu inspirée de ma relation avec une super amie à moi. Mais à nouveau je dirais que ces personnages sont un peu composites. L’amitié est un sujet assez passionnant à aborder, les discussions entre amis, montrer les liens entre deux personnages.

On y retrouve aussi ma mère, évidemment. J’ai beaucoup de tendresse pour ce personnage-là. Dieu merci, elle ne lira jamais le bouquin parce qu’elle a peur de voir mon intimité.

Comment concrètement as-tu construit cet objet ?

Maybelline Skvortzoff : J’ai monté un dossier béton, j’avais mon scénario complet et les dix premières pages. Quand j’ai signé chez Tanibis, je me suis rendu compte que la seule manière de mener ce projet à bien était de m’interdire de sortir, de boire une bière, sinon je pars en vrille. Je sais très bien comment ça se passe dans mon cerveau.

Là je n’ai pas encore commencé mais je vais me remettre dans cette discipline-là. Je me lève tôt, je vais faire du sport, je mange des œufs, je me mets devant ma table à dessin, je bosse quatre heures jusqu’à 13 heures, je bouffe, et c’est reparti jusqu’à 21 heures où je m’écroule épuisée. Et c’est comme ça.

Sinon le processus est assez classique. J’écris un scénario comme un scénar de film, très précis avec des didascalies et tout, ensuite je passe au découpage scène par scène, c’est-à-dire comment sont foutues les cases, la composition des planches, etc. Et après je crayonne et j’encre à la tablette graphique. C’est un truc assez protocolaire étrangement. Je faisais 4 planches par semaine, j’envoyais à mon éditeur, il me faisait des retours toutes les semaines. Moi j’aime bien, je n’ai pas de problème avec la réécriture.

Pour revenir à l’objet, j’avais envie d’un truc moelleux, sensuel. Un effet fesse, presque.

Un effesse ?

Maybelline Skvortzoff : Oui, c’est important. L’objet a du sens avec l’histoire. C’est pas mal utilisé en jeunesse et du coup, c’est rigolo avec une histoire pareille de lui donner un toucher un peu enfantin.

Roxane s’en sort par la relation avec son amie, mais toi, qu’est-ce qui t’a fait sortir de la spirale infernale ?

Maybelline Skvortzoff : J’ai d’énormes problèmes d’auto-destruction. De tous mes amis je suis l’une des pires, c’est quelque chose qui fait vachement peur aux gens qui m’aiment. Mais la BD, le fait même de suivre un personnage au fur et à mesure des pages que tu vois vivre ces mêmes trucs, c’est un sacré exorcisme. Ça paraît extrêmement cliché, mais ça m’a sauvée.

Du coup, qu’est-ce que tu vas exorciser dans le prochain projet ?

Maybelline Skvortzoff : L’amour. Ça va énormément parler d’amour. Encore une fois, on écrit sur ce qu’on connaît et ce qu’on est. J’ai vécu un chagrin d’amour terrassant, et là je me suis dit : "c’est de la survie, si je ne fais pas mon projet je vais crever". Je me réveillais le matin avec un mal au ventre profond. Je ne pouvais plus sourire, je ne pouvais plus rire, c’était trop douloureux. Il fallait que je crée un truc sinon je ne m’en sortais pas. Du coup, merci Antonin de m’avoir larguée. En plus, il m’a permis de créer un personnage très drôle de rappeur blanc qui essaie de percer.

Pourquoi avoir choisi la bande dessinée comme moyen d’expression ?

Maybelline Skvortzoff : Je crois que c’est vachement dû à mon père qui est un immense fan de bande dessinée, qui avait une bibliothèque gigantesque, avec de la BD érotique que j’ai découverte très jeune. Quand mes parents dormaient j’allais les feuilleter. Je suis tombée sur Le Déclic de Manara ; j’ai été choquée par la virtuosité du trait et ces histoires tellement transgressives et tellement crues. Je pense que ça a créé quelque chose en moi. Et je dessinais tout le temps.

Qu’est-ce que tu as fait avant Roxane ?

Maybelline Skvortzoff : Pour ma BD de fin d’études, je voulais raconter l’histoire d’un pédophile qui ne passera jamais à l’acte et du coup décrire l’enfer de son quotidien. Il se met à sortir avec une nana de son âge qui a deux petites sœurs. J’ai essayé de faire un truc subversif mais de le traiter avec un certain respect, je voulais créer de l’empathie. Quand je le regarde aujourd’hui, je trouve que ça pique les yeux et que c’est mal fait en termes de dessin.

Qu’est-ce qui a progressé dans ton dessin ?

Maybelline Skvortzoff : Avant je détestais dessiner des décors, ils ressemblaient à du carton-pâte. J’ai commencé à aimer en dessiner avec Roxane, en y calant des posters que je kiffe. A partir du moment où tu t’amuses à reprendre la typo d’Alien ou de Rosemary’s baby, ça devient graphique. C’est ça qui me plaisait dans les décors, c’était de mettre des références. Et il y en a beaucoup. C’est cool d’avoir ça en arrière-plan, que le personnage ne soit pas en train de flotter bêtement.

Un dernier mot pour la postérité ?

Maybelline Skvortzoff : A la fin de l’album, même si ce n’est pas explicité, on se doute que le personnage va décider de lever le pied. Mais contrairement à ce que l’on m’a beaucoup dit, je ne juge pas que ce n’est pas moral de vendre ses culottes. Je n’ai pas voulu délivrer un message sur la société, je ne suis pas sociologue.

Il n’y a pas un marché pour les slips d’homme ?

Maybelline Skvortzoff : Moi j’achèterais bien le slip de Colin Farrell. Je pense qu’il porte des slips kangourous, c’est un Irlandais terre-à-terre.

 

En savoir plus :
Le site officiel du Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême
Le Facebook du Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême

Crédits photos : Guillaume Pilla


Anaïs Bon         
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