Spectacle musical conçu par Annadré Vanier et Michel Vivacqua et interprétée par Annadré Vanier accompagnée au piano par Stan Cramer (ou Nathalie Miravette) dans une mise en scène de Rosalie Symon.

Toute en noir, des cheveux au pantalon, Annadré rend hommage à Juliette Gréco, en la racontant en chansons. Accompagnée au piano par l'impassible Stan Cramer, elle n'a pas trop de soixante-quinze minutes pour traverser avec la grande dame de la chanson française plus d'un demi-siècle glorieux.

Si on est un peu tatillon, on soulignera les oublis et les manques, de Daryl Zanuck à Belphégor, d'Agnès Capri à Michel Piccoli. Si l'on est raisonnable, on dira que tout y est, de Léo au Grand Jacques, de Gérard Jouanest à Kosma-Prévert.

Annadré a un atout majeur : elle chante bien, aussi bien que son sujet. Elle connaît sur le bout des doigts son répertoire, peut se permettre de chanter ce qu'elle considère comme le meilleur de Juliette sans se contenter des "tubes". On aura bien la Javanaise gaisnbourienne et la Jolie môme à Léo, mais aussi une très belle version de "J'arrive" de Brel.

Elle entrecoupe les chansons de propos biographiques, explique à tous ceux qui les ont oubliés qui étaient Bernard Dimey et Maurice Fanon. Annadré redonne vie à ce joyeux gibier de cabaret porté sur la bouteille et forcément tout près du caniveau quand se pointait le petit matin.

Attention, la chanteuse est impertinente, a la parole parfois leste saupoudrée d'un peu de gouaille germanopratine. Alors pas question de sombrer dans la nostalgie du temps où Juliette avait encore son nez. Tout ça c'est peut-être du passé. Tous ces auteurs célébrés par Gréco ne sont plus que des fantômes d'alcooliques, mais ça ne les empêche de se réveiller à tue-tête quand Annadré, avec la permission expresse de Juliette, redonne vie à leurs beaux vers.

C'est grâce à son opiniâtreté, associée à un beau brin de talent, qu'elle réussira à sauver de l'oubli Juliette et tous ses amis. La curiosité appelant la curiosité, le spectacle "Un petit air de Juliette Gréco" mis en scène par Rosalie Symon s'avère d'une grande nécessité et son succès, dont on ne doute pas, fera beaucoup pour la connaissance d'une époque d'une grande richesse culturelle et humaine.