J’ai eu le plaisir d’échanger avec Peter Callate, le chanteur à la voix rockailleuse de The Togs, quelques jours avant la sortie de leur troisième album Guests et de la release party. Je remercie au passage Véronique qui a permis cet échange possible.
Nous avons échangé au sujet du groupe, de la musique en France et surtout autour de ce magnifique objet qu’est leur nouvel album et du gatefold.
Bonjour Peter. Tout d’abord peux-tu te présenter ?
Peter Callate : Ça fait des années que je fais de la musique. J’ai commencé dans les années 80, dans plusieurs groupes, plutôt rock’n’roll, très rock’n’roll même : The Bombs, sur Lyon. On a fait pas mal de compositions et quelques reprises, puis on a splitté.
Avec le bassiste, on a remonté un trio qui s’appelait The Refugees. On n’a jamais concrétisé sur un album. On a pas mal tourné, dont de bons souvenirs au Rockstore à Montpellier. En 1992, Cab nous a rejoints à la guitare. Puis nous nous sommes arrêtés. Comme beaucoup de groupes français qui chantent en anglais et qui ne trouvent pas de créneaux.
Je suis parti vers d’autres horizons professionnels (je travaille dans le spectacle). Et puis en revenant dans la région lyonnaise, à Vienne, ça m’a repris comme ça, sans savoir pourquoi ! Je me suis remis à écrire, j’avais des choses qui traînaient. J’ai repris avec un trio viennois, assez Motörhead dans l’esprit. J’ai joué aussi avec un groupe qui m’a sollicité pour faire les guitares et les arrangements, ils s’appelaient Big Ass, un quatuor, avec une fille à la batterie, qui a trouvé le nom du groupe. On s’est arrêté.
Et un jour en allant dans un festival, je recroise un collègue que je n’avais pas vu depuis 25 ans, je savais qu’il jouait plutôt de l'acoustique. Je l’ai branché. Et au bout de quelques bières, il a accepté (rires). On a fait notre premier concert en septembre 2017. On a fait pas mal de lieux, une vingtaine. Il faudrait que je regarde les affiches que Véronique avait faites à l’époque. Je tiens à ce qu’il y ait un visuel différent par événement avec The Togs, que ce soit album ou concert.
Fred est resté et on a fait un album : Originals, fait façon "cuisine", plein d’imperfections, mais que j’aime beaucoup. On y a mis tout ce qu’on avait, pour marquer le coup.
Puis, Fred est parti parce qu’il a un métier compliqué. C’est dur en France de faire de la musique en indépendant, il faut marner à côté. Il m’avait présenté Stagef Augagneur, avec qui il jouait de façon plus ou moins sporadique et entre autres, avec un Louisianais : Bobby Michot. Stagef joue de la guitare électrique, de la mandoline, du bottleneck, etc., a dit OK pour le projet.
J’écris beaucoup, j'avais de nouvelles chansons et on s’est consacré à un nouveau répertoire puis on a enregistré un deuxième album : Thirteen (pour 13 compos). Nous avons enregistré dans de meilleures conditions, dans un studio. Il est sorti en février 2020. On est resté un peu le bec en l’air. On ne pouvait rien faire avec la pandémie COVID, pour défendre l’album en live.
Alors, comme j’avais encore des titres, je me suis dit qu’on pourrait faire un enregistrement en invitant tous les artistes qu’on connaissait. Des musiciens de Rhône-Alpes. On a enregistré des pré-maquettes qu’on leur a envoyées. Ils ont accepté le challenge et ils sont 34 !
On nous a traité de fous. Il a fallu du temps pour accorder les plannings des uns et des autres. Il a fallu faire des rendez-vous de studios car il y en a trois (NDLR : 8 PM, Supadope, Islandroad Studio). Ça nous a pris deux ans pour le sortir, avec toujours Véro pour nous proposer des images. Je voulais un objet. Que cette énergie mise à faire ce gatefold ne soit pas simplement un autre projet parmi d’autres, mais réellement une gageure. Nous voulions marquer le coup avec un bel objet.
On sait qu’on n’est pas en odeur de sainteté en France quand on fait du Rock’n’Roll, on a peu de support. Même les salles quand on dit qu’on est deux et qu’on ne fait pas de reprises ne nous facilitent pas les choses. Et nous, on a envie de jouer et de voir le public réagir à ce qu’on lui propose. Il y a heureusement des petits îlots de résistance qui se recréent, après avoir disparu entre 1995 et 2015, des passionnés qui disent : venez jouer chez moi.
Nous allons faire connaissance : avec quel artiste aurais-tu aimé partager la scène ?
Peter Callate : Ils sont tous morts ! (rires) Sinon, je prendrais Jimmy Page (NDLR : qui est bien vivant à ce jour). Je suis très fan. Je trouve que c’est un compositeur hors pair, grand adaptateur. Il a une forme de simplicité qui me laisse pantois. Il prend sa gratte et il montre à Jack White comment il fait (NDLR : tu peux trouver ces vidéos sur YouTube) avec The Edge. Et eux, ils le regardent comme pas possible.
Et lui aussi les regarde avec de grands yeux…
Peter Callate : Il a une grande humilité, en effet. Il a vécu de grandes années rock’n’roll. Il a un regard et encore plus une oreille sur la musique qui est super intéressante. Son côté compositeur aussi me plaît énormément, comme ces open tuning sur l’album III.
Vous n’avez aucun label, vous êtes 100% autoproduit et vous proposez un double vinyle magnifique. Parlons un peu plus de ce projet.
Peter Callate : J’ai financé le projet pour cette passion… J’ai regardé ce que j’avais dans ma besace, je continue de bosser et mon employeur alimente ma cagnotte. J’ai peu de besoins.
Vous allez faire une release party le 6 octobre à Villeurbanne. Vous allez faire venir les 34 invités avec vous sur scène ?
Peter Callate : Ils ne seront pas tous là. Hélas, nous avons perdu deux musiciens : Charly Markarian qui est un guitariste réputé lyonnais et Bruno Collet, un bassiste aussi de la même qualité. Ils sont décédés récemment. Il y a d’ailleurs un petit mot pour chacun sur le livret sur les morceaux où ils apparaissent (NDLR : "Alien" et "Success Story").
Les Louisianais ne pourront pas venir, parce que c’est compliqué. Il y a quelques musiciens intermittents du spectacle qui ne pourront pas venir non plus. Comme je te l’ai dit, ça a été très difficile de réunir tout le monde. On sera une trentaine sur les 34. Mais pas tous en même temps (rires).
Est-ce que tu travailles particulièrement ta voix ?
Peter Callate : Non je ne travaille rien du tout d’ailleurs, comme le dit Stagef (rires). C’est venu comme ça, je ne chantais pas comme ça avec les Refugees. Avec l'acoustique, tu as une espèce de corps qui est près de toi, qui résonne.
Paradoxalement en France, il y a beaucoup de festivals rock et pourtant cette musique est peu représentée dans les médias. Comment tu analyses ça ?
Peter Callate : Je ne peux pas te dire. Je pense qu’ils ont des cahiers de charge qui ne le leur permettent pas. C’est peut-être aussi dû au marché qui s’est développé avec d’autres objectifs. A part pour les groupes étrangers, américains, anglais, australiens et suédois (que j’aime beaucoup). Le marché n’existe pas pour les groupes français. Il y a encore des gens comme Little Bob qui tourne et qui porte haut l’étendard avec sa gouaille havraise. C’est difficile. On est devenu un style mineur. Hélas.
On en discutait, au sujet du groupe Gluecifer, qui refait des tournées et qu'on ne verra pas en France.
Je suis bien d’accord.
Peter Callate : C’est une question de maison de disques, de manager. Les groupes viennent pour remplir de grandes salles, sinon ça ne rapporte rien. Ça devient élitiste ! Un billet pour un groupe comme Queen of the Stone Edge c’est presque 60 euros. Parce qu’ils viennent avec beaucoup de matos et que le coup plateau est énorme et qu’il faut rentabiliser tout cela. La télé ne ferait pas ça.
Est-ce que les plateformes et les réseaux sociaux ont participé à cela et est-ce que vous les utilisez ?
Peter Callate : Moi je ne suis pas connecté. On me dit de le faire mais je n’y pige que dalle. Je vais faire une composition et je laisse ça à Véronique qui maîtrise mieux. On n’a pas ces automatismes. Quand je rentre à 2 ou 3 heures du matin, je n'ai pas envie de me connecter, au mieux je vais écrire de la musique dans ma cave. Il n'y a pas d’aigreur. On se démerde nous-mêmes !
On n’a pas été chercher de label. J’avais le pognon et j’ai foncé. Le projet était alléchant, je ne prétends pas qu’on a fait la plus belle musique du monde, juste que c’est la meilleure (rires).
Je vais te raconter une anecdote. Quand on a reçu les vinyles, Véro est descendu de Paris et on a décidé d’aller faire un resto avec Stagef. Je n’avais pas dit qu’on avait les disques et j’ai emballé ça dans un truc tout simple. Et je lui ai offert en lui disant que j’avais oublié son anniversaire et que j’avais trouvé un truc dans une brocante. Il ouvre le papier. Et là rien que la tête qu’il a faite, ça valait tout ce qu’on y avait mis !
On sent la passion !
Peter Callate : On y tient. D’avoir l’accompagnement de Véro qui nous fait un visuel par événement, c’est déjà une exigence de qualité. Les gens y trouvent ce qu’ils veulent et il en faut pour tout le monde.
Merci de nous avoir accordé du temps. Je te laisse conclure l’interview !
Peter Callate : Musicalement, qu’est-ce que toi tu en as pensé ?
J’ai adoré ! (NDLR sinon je n’en parlerais pas !) Il y a tellement de choses.
Peter Callate : Le propos de The Togs c’est l'éclectisme, on s’abreuve de ce qu’on a entendu forcément.
Pour conclure, on a aussi un sonorisateur attitré, Rémi Selles qui a fait le mixage, il fait partie du groupe au même titre que Stephane Augagneur, Véronique Voignard et moi. J’espère qu’on aura l’occasion de faire d’autres albums et des concerts !
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