Réalisé par Sandrine Dumas. Documentaire. 1 heure et 15 minutes. Sortie le 24 avril 2024. Avec Marilú Marini.
Les lecteurs de la partie théâtrale de Froggy n'ignorent pas quelle grande actrice est Maria Lucia Marini, dite Marilu Marini. Les autres vont l'apprendre peu à peu dans le très intéressant documentaire que lui consacre Sandrine Dumas.
On prévient donc d'emblée qu'on est ici devant un portrait très réussi de la comédienne franco-argentine, pas devant une biographie qui raconterait sa vie date après date. Dans "Marilu", Sandrine Dumas, qui fut sa partenaire quand elle monta sur les planches après un début de carrière plutôt cinématographique, ne s'intéresse qu'à celle qui fut l'égérie d'Alfredo Arias pendant trente ans et depuis n'a plus quitté les scènes parisiennes, françaises et argentines.
Appelée en 1976 à venir en France pour rejoindre le groupe TSE fondé par Arias, elle évitera ainsi la dictature qui s'installe dans son pays. Dans "Marilu", on la verra d'ailleurs visiter ce qui fut un moment sa prison à Bueno Aires, quelque temps avant l'arrivée de Videla et de sa clique.
Sandrine Dumas montre des archives de ses grands moments dans le groupe TSE, de sa période où elle travaille avec ses compatriotes, notamment le sulfureux Copi, dont elle incarnera merveilleusement "La Femme Assise", et évidemment avec Arias dont elle sera "Cathy", la chatte française, dans "Peine de cœur d'une chatte anglaise".
Mais Sandrine Dumas va surtout la suivre à partit des années 2010. Si elle l'interviewe, elle préfère la filmer au travail. On la découvrira particulièrement en train de répéter avec Pierre Maillet "Le Bonheur (n'est pas toujours drôle)" d'après Rainer Werner Fassbinder.
Bien qu'elle approche les 80 ans, son visage reste celui d'une petite fille espiègle et radieuse, son corps celui de la danseuse qu'elle a d'abord été et n'a jamais cessé d'être. Elle affirme avec la grande détermination qui la caractérise qu'elle est d'abord une "clownesse", une clown qui jouerait la tragédie.
Ceux qui la découvriront pour la première fois admettront aussitôt le message que Sandrine Dumas veut faire passer : Marilu Marini est de la race des grands comédiennes. Son aura, son visage toujours souriant, son énergie, son intelligence, elle sait les communiquer aux autres. Elle fait partie de ces artistes qui font ce métier non par narcissisme ou soif de gloire, mais pour partager.
Au-delà de tout ce qu'on apprendra sur elle, et qu'on n'oubliera pas, on sort heureux de cette heure et demie en sa compagnie. On ne sera pas original pour résumer son portrait tracé par Sandrine Dumas : oui, c'est une belle rencontre avec une femme remarquable qu'on espère pouvoir revoir encore longtemps sur scène.
Philippe Person
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