Normalement celui qui renaît de ces cendres, c’est un phénix, c’est un oiseau de feu et pas du tout un cheval sauvage de l’Ouest américain et pourtant, c’est la renaissance de l’un des meilleurs groupes français et injustement sous-estimé : Mustang avec leur nouvelle album le bien nommée donc : Megaphenix.
Mustang, le groupe des Auvergnats Jean Felzine et Johan Gentile avec un nouveau batteur venu directement de Louise Attaque, Nicolas Musset, bref c’est un power trio entre gomina et guitare. C’est un peu comme ça qu’on les a découverts en 2009 – déjà 15 ans, avec une imagerie un peu rockabilly, même si je ne suis pas certain qu’ils l’eurent réellement un jour été...
Mustang sort donc leur nouvel album ce qui est une surprise tant leur album précèdent Memento Mori, "n’oublie pas que tu vas mourir" sonnait comme une prophétie, comme s’ils ne se donnaient "pas cher de la nuit".
Après la mort la résurrection donc, et évidemment quoi de mieux qu’un Mégaphenix qui est un objet qui permet de ressusciter les membres d’une équipe dans le jeu Final Fantasy, ce n’est pas une blague. Jean Felzine, l’auteur compositeur principal du groupe, est profondément marqué par la pop culture, les jeux vidéo et tout ce qui gravite autour (un geek ?), comme il nous le rappelait dans "Fan Fiction" sur son album solo "On vit dans une fanfiction faite par un fan d’Evangelion", le ton est donné — si vous n’avez jamais vu Evangelion, on est dans une expérience émotionnelle complexe et intense entre dépression et fin du monde — car il y a ça aussi chez Mustang, un regard acéré et parfois noir sur le monde qui les entoure.
Quand ils ont commencé à enregistrer les chansons pour cet album, il n'avait pas de label, pas de contrat, pas de projet particulier, rien, juste l’envie d’enregistrer des chansons ensemble, sans arrière-pensée. Ils sont désormais signés chez Vietnam le label de So Press, mais cette période de creux donnera d’ailleurs "La porte au Nez", chanson drolatique et pathétique sur le fait de devoir se battre pour exister "et les majors et les indés t’es trop variète ou t’es trop spé", inclassable et désespérément perdant magnifique. Et c’est un aussi très bon résumé : est-ce du rock ? Est-ce de la chanson française ? Est-ce les deux ?
D’ailleurs, ils poussent le vice à se payer "La Chanson Française" sans faire de prisonnier — ce qui pourrait presque passer pour un hommage à Jean-Louis Murat autre Auvergnat qui a passé une partie de ses interviews à vomir sur la chanson française — pour Mustang, dans une délicieuse et incroyable supplique : "La chanson française, elle est tellement conne, elle sonne mal, la chanson française, elle pèse une tonne, elle pèse que dalle".
Vous avez compris, j’insiste un peu sur les textes car je trouve que Jean Felzine est l’un des meilleurs paroliers du moment, ces textes sont souvent vachards, crus mais oscillant entre les niveaux de langage, drôle, doux amer, colérique, avec une douce pudeur parfois, ancré dans le réel et le quotidien, mais toujours avec une finesse, une justesse et un sens de l’observation rare. Et aussi il faut bien l’avouer un peu de politique, ce n’est pas un disque engagé, juste un disque qui dit des choses...
"On a toujours voulu sur un disque ne pas faire deux fois la même chanson" déclarait Jean Felzine à Ouest France. Et c’est exactement ça. Non seulement les textes sont parfaits mais musicalement, on va trouver une générosité de style et de genre pop avec son ouverture "Je Ne Suis Plus Aimé", incroyable morceau pop dont les cordes sont magnifiques, pour passer par le rock avec un "Wikipédia" explosif par exemple, mais ce n’est pas tout il y a un peu électro, du Morricone, osant presque la biguine pour terminer l’album avec "Aigre Doux" dont le titre ne ment pas sur la marchandise.
Je ne vais pas trop en dévoiler parce que je suis conquis et que je pourrais donc en parler des heures mais je me dois de vous protéger afin que vous profitiez vous aussi des surprises et autres chocs que le disque contient. Et pour vous dire à quel point ce disque me plaît, c’est que je suis prêt à dire du bien d'Arthur Teboul, le chanteur de Feu ! Chatterton qui est invité sur un autre sommet de l’album à savoir "Aéroport", c’est dire.
Ce serait absurde de dire que c’est le meilleur disque de Mustang, c’est tous leurs meilleurs mais c’est indubitablement l’un des meilleurs disques de "chansons en expression française". Bref écoutez Mustang, faites écouter Mustang qu’enfin ils ne soient plus chez eux tout juin, juillet.