Lost Records : Bloom & Rage raconte l’histoire de quatre adolescentes, un été de 1995 dans une ville imaginaire, Velvet Cove,  qui pourrait être celle que l’on a toutes et tous connus à un moment de notre vie (bon OK, peut-être que vous avez grandi dans une grande ville, mais vous aviez bien une mamie à la campagne, non ?).

Quatre adolescentes qui sympathisent par un concours de circonstance et qui deviennent rapidement amies bien que peu de points communs semblent les réunir. L’union fait la force quand on s’ennuie à mourir. 

Ces personnages vont se retrouver 27 ans plus tard, non pas Place des grands hommes mais dans le même pub qu’elles fréquentaient en 1995. Convoqués par un mystérieux colis qui "exige" leur présence pour être ouvert.

Commence alors une narration en forme de spirale qui oscille entre les souvenirs qui ressurgissent de ce fameux été 95 et des discussions au pub en 2023 sur le temps qui passe et la vie de chacune des protagonistes. On ne dévoilera guère plus de l’intrigue pour ne rien gâcher au joueur mais disons le tout de suite, ce nouveau jeu de Don’t Nod Montreal (branche de Don’t Nod France, auteur de nombreux jeux narratifs dont le déjà magnifique Life is Strange) est formidable. Car oui, il aurait pu s’agir d’un film, voire d’une série, mais ce Lost Records est bien un jeu vidéo.

La narration est de haute volée, le scénario qui ne laisse rien présager du tournant qu’il va prendre est incroyablement bien ciselé, les personnages sont denses, intéressants, variés et surtout très très bien réalisés (je parle de la modélisation, très réaliste de tous les personnages du jeu avec une mention spéciale pour Swann, mais toutes et tous sont réussis).

La mise en scène est également à la hauteur, visuellement c’est superbe, sans être tape-à-l’oeil, mais la patte graphique est parfaite, les plans sont toujours bien pensés (d’ailleurs, il est souvent question de vidéos puisqu’un des personnages ne quitte quasiment jamais son camescope et c’est un élément important du gameplay). 

Chaque scène est pensée et cadrée impeccablement. Tout est là pour nous faire oublier le côté "jeu" de cette œuvre et nous plonger, quel que soit notre niveau de joueur (débutant ou non) dans l’histoire jusqu’à se prendre d’affection pour ses personnages. Encore plus que dans un film d’ailleurs puisque nous en sommes les acteurs. Nous ne sommes plus passifs devant le destin de ces quatres filles, nous sommes elles et ça change tout...

Dans la peau de Swann nous allons donc découvrir, entre flashback en 1995 et discussions autour d’une bière en 2023 ce qui est arrivé à ces quatre amies, mais aussi à d’autres protagonistes que vous découvrirez en jouant. Au fil de la discussion, on sent un trouble s’installer et les souvenirs qui en découlent prennent des airs de contrition.

Point fort du jeu, les doublages des personnages sont impeccables en français (Don’t Nod est un studio français mais quand même, tous ne font pas l’effort de la qualité sur les doublages, voire se contentent de la langue de Shakespeare).

Autre point non négligeable, la bande son est magnifique et se place directement au côté du chef d'œuvre qu’était la BO de Life Is Strange premier du nom (Syd Matters, Radiohead, Bowie, Iron & Wine et j’en passe). Ici c’est Beach House, Cocteau Twins mais aussi des artistes moins connus (de moi en tout cas) qui ont travaillé sur cette BO impeccable pour qui aime le shoegaze et la dream pop comme Milk & Bone, Ruth Radelet ou Nat Walker.

Jusqu’à la dernière seconde, ce jeu qui traite de l’adolescence mais aussi du passage à l’âge adulte, de ses rêves perdus (ou non), de punk rock, d’insouciance aussi avec un brin de surnaturel (mais tellement bien amené) vous laissera le souffle court. Un jeu touchant, émouvant qui a déjà une suite (et fin) qui arrive en avril 2025. Tout ce qu’on aime dans un bon film est là mais vous en êtes l’acteur, et ça change tout. 

En tout cas, Lost Records affirme si besoin était que Don’t Nod est une référence, sinon LA référence en terme de jeu narratif et on a hâte de voir la suite tant la fin du premier épisode est incroyable.

Vous avez compris, que vous soyez gamer ou non (n’importe qui peut jouer, on se laisse porter par l’histoire et nul besoin d’être un as de la manette), ce jeu est à découvrir absolument, c’est une oeuvre magnifique qui se hisse à la hauteur de Life is Strange (tout du moins ceux créés par Don’t Nod).