Spectacle écrit par Gilles Dyrek et mis en scène par Eric Bu avec Mélanie Page, Grégori Baquet, Marine Dusehu, Stéphane Roux, Etienne Launay.
Avant que débutent les aventures de Georges, le mal-prénommé, le dernier à avoir reçu ce prénom désuet plus beaucoup prononcé depuis la mort du président Pompidou et le déclin du parti communiste du camarade Marchais, le spectateur découvre un décor étrange.
Tout blanc, composé de deux parties disposées transversalement de chaque côté de la scène, laissant comme surface utile une surface centrale formant un V à l'envers. Pourquoi un tel minimalisme alors qu'on annonce une pièce amusante, dans la lignée de la précédente collaboration de Gilles Dyrek et d'Eric Bu, "Le Retour de Richard 3 par le train de 9 h 24", dont Eric Bu avait aussi tourné une version cinématographique fort réussie ?
Le spectateur n'aura pas longtemps à attendre : on lui promettait sur des affiches de la "bédé" et, effectivement, sur les surfaces blanches vont tout au long de la pièce se succéder des éléments dessinés figurant des devantures de boutiques ou de bars, des pancartes, des éléments qui composent symboliquement des lieux où on vit ou on travaille. La scénographie composée par Marie Hervé est subtile et malicieuse et les dessins de Marion Auvin sur lesquels elle s'appuie sont fort réussis. Ils donnent tout de suite un préjugé favorable au texte de Gilles Dyrek et celui-ci ne va non plus décevoir. Sur le papier, ce tourbillon de gens mal prénommés qui conteront de petites anecdotes concernant ce fait générateur de leur existence pouvait-il fournir de quoi nourrir une comédie romantique ?
On aurait pu douter, mais à ce départ bien léger s'ajoute un autre détail tout aussi insignifiant... Georges (Grégori Baquet) vient d'être quitté par sa petite amie et décide de changer de vie : direction Chatenay-Malabry. Lors de son premier jogging dans son nouveau quartier, il découvre quelque chose d'insensé (pour lui seul) : il est entouré de villas, de résidences, de lieux-dits qui portent les prénoms de ses ex ! Et, face à son appartement, sera bientôt érigée une "Villa Emilie" ! Comme il n'a pas eu de rapports intimes avec des demoiselles de ce prénom, il se persuade que sa prochaine partenaire devra , à coup sûr, être une Emilie, "i-e" ou "y'.
Evidemment, quand il tombe dingue amoureux d'une inconnue (Mélanie Page), il est tétanisé, incapable de lui demander si le hasard patronymique a bien fait les choses...
Le reste, c'est une pièce qui donne la pêche, écrite avec une plume espiègle, digne de l'admirateur de René de Obaldia qu'est Gilles Dyrek. Une pièce jouée avec gourmandise par le couple vedette et par leurs trois partenaires (Marine Dusehu, Stéphane Roux et Etienne Launay), qui ne sont pas des comparses mais doivent multiplier les personnages, ce qu'ils font avec beaucoup de plaisir, tout cela orchestré avec humour et précision par Eric Bu, qui donne à l'ensemble un petit côté cinématographique. Donc, pas de temps mort et rien d'inutile dans cette bulle de savon qui éclate au bon moment. Ni trop courte, ni trop longue, "Je m'appelle Georges et vous ?" a l'avantage de reposer sur des petites idées indémodables...
Pour l'heure, on ne lui prédira pas la postérité qu'on pressent pourtant, mais un vrai beau succès mérité. Le couple Mélanie Page-Grégori Baquet fonctionne à merveille. On leur souhaite de pouvoir défendre souvent un théâtre comme celui de Dyrek et de Bu, à la fois populaire et intelligent.